Des cabinets médicaux engagés dans la campagne de vaccination

FMH
Édition
2022/2728
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2022.20902
Bull Med Suisses. 2022;103(2728):886-889

Affiliations
a Collaborateur scientifique, section Services de santé, Office fédéral de la statistique, b Experte, division Médecine et tarifs ambulatoires, FMH

Publié le 05.07.2022

Les résultats du dernier relevé des données structurelles des cabinets médicaux et des centres ambulatoires (relevé MAS) de l’Office fédéral de la statistique montrent une forte participation des cabinets médicaux à la campagne de vaccination contre le COVID-19. Plus d’un cabinet de médecine de premier recours sur deux y a pris part.
Mat Napo / Unsplash
En 2021, la pandémie de COVID-19 et les mesures prises pour la contenir (quarantaines, isolements, plan de protection, etc.) ont continué d’affecter les ­activités économiques en Suisse. A l’instar d’autres secteurs, tous les cabinets médicaux n’ont pas ­retrouvé un ­niveau d’activité normal, bien qu’ils n’aient pas subi de nouvelle interdiction de réaliser certaines prestations, comme ce fut le cas au printemps 2020. Dans ce contexte, l’Office fédéral de la statistique (OFS) a intégré pour la deuxième fois de suite un module thématique dans le questionnaire du relevé des données structurelles des cabinets médicaux et des centres ambulatoires. Il s’agissait d’évaluer l’impact de la pandémie sur l’activité médicale des cabinets ­médicaux ainsi que leur recours à ­diverses mesures économiques, en considérant la ­période de novembre 2020 à octobre 2021. Le module traitait également de la participation des cabinets à la campagne de vaccination. Une publication de l’OFS approfondissant l’impact de la pandémie sur l’activité des cabinets médicaux en 2020 paraîtra en automne 2022.

11 000 cabinets ont transmis leurs ­données

Dans le cadre du relevé MAS des données de l’année 2020, 17 790 cabinets médicaux et centres ambulatoires fournissant des prestations médicales ambulatoires ont été interrogés. Les résultats présentés ci-après reposent sur les données des 10 736 entreprises qui ont transmis leur questionnaire à l’OFS et autorisé l’utili­sation de leurs données à des fins statistiques. Le domaine d’activité principal de ces entreprises était pour 38% la médecine de premier recours et pour 21% la psychiatrie. 85% d’entre elles travaillaient avec leur propre infrastructure (locaux, mobilier, appareils médicaux, etc.) et la même proportion était organisée en entreprise individuelle (raison individuelle), propriété d’un médecin indépendant.

Une activité réduite

Sur la période de novembre 2020 à octobre 2021, 42% des cabinets médicaux ont eu une activité réduite par rapport à celle qu’ils connaissaient avant 2020. A l’inverse, 51% des cabinets ont connu un niveau d’activité normal, voire ont augmenté leur activité (graphique 1). Dans l’ensemble, la situation des cabinets médicaux s’est fortement améliorée par rapport à la période de mars à octobre 2020 où seul un cabinet sur dix avait pu maintenir son niveau d’activité [1]. L’évolution de l’activité des cabinets a cependant différé selon les régions. En Suisse orientale, seuls 33% des cabinets ont eu une activité ­réduite par rapport à une année d’activité normale. Dans la région lémanique et dans le canton du Tessin en revanche, une telle situation a concerné 47% des cabinets. Ces différences peuvent refléter le fait que toutes les régions n’ont pas été touchées de façon similaire par la pandémie. De plus, les mesures prises pour la contenir et pouvant affecter l’activité des cabinets médicaux ont pu différer d’un canton à l’autre.
Graphique 1: Evolution de l’activité des cabinets médicaux de novembre 2020 à octobre 2021, par rapport à la situation d’avant la pandémie, par grande région. Source: OFS – MAS
Sur la période de novembre 2020 à octobre 2021 comme sur la période de mars à octobre 2020, les cabinets médicaux avec activité chirurgicale ont été les plus affectés. Une réduction d’activité a touché 61% d’entre eux. Dans les autres domaines d’activité, comme la médecine de premier recours ou la gynécologie, entre 41% et 50% des cabinets ont eu une activité réduite. La psychiatrie fait exception. Alors que 26% des cabinets ont connu une réduction de leur niveau d’activité, 17% l’ont augmenté.

Un recours fréquent au chômage partiel

Pour autant qu’ils aient rempli les conditions requises, les cabinets médicaux ont pu utiliser différentes ­mesures économiques pour atténuer les effets sur leur activité de la pandémie de COVID-19 et des mesures prises pour y faire face. Entre novembre 2020 et ­octobre 2021, comme entre mars et octobre 2020, le ­chômage partiel a été la mesure la plus fréquemment utilisée (graphique 2). Le recours à cette mesure a ­toutefois reculé de 15 points de pourcentage, de 35% des cabinets en 2020 à 20% en 2021. Le recours au chômage partiel était possible pour les salariés (médecins ou personnel non médical), les personnes en apprentissage, les personnes au service d’une organisation de travail temporaire et les personnes occupant une position assimilable à celle d’un employeur. Les médecins indépendants touchés indirectement par les mesures destinées à lutter contre le COVID-19 ont pu bénéficier d’une indemnité pour perte de gain. La part de médecins indépendants au bénéfice de cette mesure est ­restée stable: 7% en 2020, 6% en 2021.
Graphique 2: Recours à des mesures économiques, en 2020 (mars 2020 – octobre 2020) et 2021 (novembre 2020 – octobre 2021). Source: OFS – MAS
Parmi les médecins indépendants avec activité chirurgicale, 37% ont recouru au chômage partiel ou béné­ficié d’indemnités pour cas de rigueur. Les médecins indépendants actifs dans la médecine de premier recours sont 26% à avoir utilisé ou bénéficié d’au moins l’une de ces deux mesures, les psychiatres indépendants, 7%. Des différences existent également entre régions. En Suisse centrale, au Tessin, dans la Suisse du Nord-Ouest, dans la région lémanique et dans l’espace Mittelland, environ 25% des médecins indépendants ont recouru au chômage partiel ou bénéficié d’indemnités pour cas de rigueur. Les proportions sont de respectivement 22% et 17% pour le canton de Zurich et la Suisse orientale.

Fortement engagés dans la vaccination

La campagne de vaccination de la population contre le COVID-19 a débuté fin 2020. Entre décembre 2020 et ­octobre 2021, 27% des cabinets médicaux y ont participé de façon active, en mobilisant des médecins ou du personnel non médical. L’administration du vaccin a pu se faire dans les locaux du cabinet ou en dehors, par exemple dans des centres de vaccination.
Les cabinets médicaux ayant contribué à la vaccination de la population sont pour 80% des cabinets de médecine de premier recours ou proposant une offre mixte de prestations médicales, comprenant généralement des prestations de médecine de premier recours. 56% de ces cabinets ont participé à la campagne de vacci­nation. Sur la base des données récoltées, il n’est cependant pas possible de mesurer quelle part de leur activité ils ont consacrée à la vaccination ni d’estimer la quantité de doses qu’ils ont administrées.
La vaccination s’est déroulée uniquement dans les ­locaux du cabinet pour 55% des cabinets avec offre de médecine de premier recours (graphique 3). 32% ont vacciné tant au cabinet qu’en dehors, 13% uniquement en dehors. Dans 74% des cabinets, des médecins et du personnel non médical (personnel de santé ou autres membres du personnel) ont été impliqués.
Graphique 3: Modes de participation à la campagne de vaccination, cabinets avec offre de médecine de premier recours, de décembre 2020 à octobre 2021. Source: OFS – MAS.

De fortes différences entre cantons

En tant que responsables de l’organisation de la vaccination sur leur territoire, les cantons ont suivi des stratégies en partie différentes, notamment eu égard à l’implication des cabinets médicaux. De ce fait, ­l’ampleur de la participation de ces derniers à la ­campagne de vaccination, de même que le début de leur engagement, varient fortement d’un canton à l’autre (graphique 4).
Graphique 4: Participation à la campagne de vaccination des cabinets avec offre de ­médecine de premier recours, de décembre 2020 à octobre 2021, par canton. Source: OFS – MAS
En ne considérant que les cantons où au moins 30 cabinets avec offre de médecine de premier recours ont transmis leurs données, il ressort que, dans les cantons de Genève, de Neuchâtel et de Bâle-Ville, moins d’un tiers des cabinets ont participé à la vaccination, que ce soit dans ou en dehors de leurs locaux. Dans les ­cantons de Schaffhouse, du Tessin, de Lucerne, de Vaud, de Zoug et de Bâle-Campagne, entre un tiers et la moitié des cabinets ont participé. Dans les dix autres cantons considérés, plus d’un cabinet sur deux a été impliqué.

Participation à la vaccination

L’engagement dans la campagne de vaccination des cabinets avec offre de médecine de premier recours a augmenté continuellement de décembre 2020 à mai 2021 (graphique 5). Cette évolution a été parallèle au développement de la campagne de vacci­nation sur le plan suisse qui, pour l’administration des premières et deuxièmes doses, a atteint son sommet entre les mois d’avril et de juillet 2021 [2]. Parmi les cabinets médicaux qui ont indiqué avoir participé à la campagne de vaccination entre décembre 2020 et octobre 2021, 81% vaccinaient au mois de mai 2021. Ils étaient encore plus de 50% à vacciner en octobre. La durée médiane de parti­cipation à la campagne de vacci­nation est de six mois. Pour 62% des cabinets, la participation à la ­vaccination a débuté entre décembre 2020 et mars 2021.
Graphique 5: Participation à la campagne de vaccination des cabinets avec offre de ­médecine de premier recours, par mois. Source: OFS – MAS

Les résultats ont été confirmés

L’analyse des données de facturation 2021 des médecins installés a montré des évolutions contrastées [3] et confirme ainsi les résultats du relevé MAS. Après avoir accusé un recul en raison de la pandémie, la demande en prestations médicales a de nouveau augmenté. Les patients ont effectué les contrôles de routine repoussés et ont opté pour une visite en cabinet au lieu d’un appel ou d’une conférence vidéo. Le monitorage des tarifs ambulatoires de la FMH a permis de confirmer les constats tirés des graphiques 1 et 2. Le nombre de personnes consultant un médecin n’a jamais été aussi élevé. Ainsi, les patients ont été plus demandeurs de prestations médicales qu’avant la pandémie. Les coûts par séance sont restés inférieurs à ceux des années précédant la pandémie.
frederic.clausen[at]bfs.admin.ch
1 Clausen Frédéric, Esther Kraft, Les effets de la pandémie de Covid-19 sur les cabinets médicaux, Bulletin des médecins suisses, 2021;102(27–28):906–9
2 Office fédéral de la santé publique, Nombre de personnes vaccinées, Suisse et Liechtenstein, 21.12.2020 au 25.4.2022 sous https://www.covid19.admin.ch/fr/vaccination/persons (état au 26.4.2022)
3 Schutz, Kerstin, Covid-19: demande accrue de prestations médicales, Bulletin des médecins suisses, 2022;103(23):760–762.