Prise en charge du diabète: soulager les médecins de famille

FMH
Édition
2022/2526
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2022.20874
Bull Med Suisses. 2022;103(2526):842-843

Affiliations
INFRAS

Publié le 22.06.2022

L’étude transversale «Interprofessionnalité dans les soins de base pour le diabète de type 2», menée par Anna-Katharina Ansorg, Sven Streit et leur équipe de recherche au BIHAM, révèle tout le potentiel de la mobilisation des CMA dans la gestion des soins chroniques.
La pénurie de médecins et la hausse des prix de la santé nous contraignent à trouver de nouvelles solutions. Quels sont les avantages des modèles de prise en charge interprofessionnels? A la suite d’une journée de réflexion de la SMCB autour du rôle des coordinatrices et coordinateurs en médecine ambulatoire (CMA), l’Institut bernois de médecine de famille (BIHAM) a étudié la prise en charge des patientes et patients atteints de diabète de type 2 dans des cabinets avec et sans CMA. Les résultats le prouvent: les CMA peuvent soulager les médecins en assurant des soins de qualité.

Une étude unique

L’étude transversale compare la prise en charge du diabète de type 2 dans les cabinets avec et sans CMA. Elle est la première étude suisse à se pencher sur les résultats du travail des CMA et a été largement soutenue, notamment par la FMH, les assureurs KPT et Visana, Diabète Suisse et la Fondation suisse du diabète, ce qui souligne l’actualité et le vif intérêt que suscitent les modèles de prise en charge interprofessionnels.
22 cabinets de Suisse alémanique ont participé, dont douze avec des CMA. L’étude porte sur un échantillon de 170 patientes et patients environ, qui étaient traités depuis au moins un an au début du projet en août 2020. La comparaison se base sur les indicateurs PROM et PREM («Patient-reported outcome / experience measures», ou résultats des soins / manière dont le patient a vécu les soins), ainsi que sur les critères de la Société suisse d’endocrinologie et de diabétologie (SSED) pour une «bonne» gestion du diabète. Les scientifiques se sont concentrés avant tout sur le point de vue des patientes et patients et la qualité de vie spécifique au diabète.
L’illustration présente un aperçu des résultats principaux. L’étude révèle que les patientes et patients atteints de diabète de type 2 et suivis dans des cabinets de médecins de famille avec CMA bénéficient d’une prise en charge d’excellente qualité. Par ailleurs, les cabinets avec CMA ayant participé à l’étude ont reçu d’aussi bons résultats pour la qualité des soins que pour la satisfaction de la prise en charge et pour la charge de traitement.

Auteurs et autrices de l’étude

Anna-Katharina Ansorg (BIHAM), Katharina Tabea Jungo (BIHAM), Esther Hilfiker (SMCB), Rainer Felber (SMCB), Judith Trageser (INFRAS), Beat Pierre Arnet (KPT), Marianne Schenk (Association suisse des assistantes médicales, ASAM), Sven Streit (BIHAM)

Un résultat positif

Que peut-on en conclure? Ces résultats nous prouvent que les médecins de famille peuvent déléguer certai­nes tâches aux CMA, même si elles sont longues et complexes. Mesures de glycémie, examens des pieds, conseils en matière d’alimentation et d’exercice physique, ... Les CMA peuvent assurer la même qualité de prise en charge que les médecins de famille sur de nombreux aspects pour les patientes et patients atteints de diabète. Face à la pénurie croissante de mé­decins de famille, ces modèles de prise en charge ­pourraient même soulager les médecins tout en préservant la qualité des soins.
L’étude ne dit pas si ce modèle permet d’économiser des frais, mais les résultats suggèrent que les CMA ­assument généralement les tâches des médecins de ­famille. Parmi les cabinets étudiés, seuls 20% ont indiqué mobiliser les CMA en plus de la prise en charge par la ou le médecin de famille.

Renforcement de l’interprofessionnalité

Les résultats de l’étude vont donc dans le sens des ­efforts en cours visant à renforcer la prise en charge ­interprofessionnelle dans le secteur de la santé. Les médecins sont toutefois confrontés à des obstacles lorsqu’ils tentent de mettre en place ce modèle. Par exemple, il est actuellement impossible de facturer les prestations des CMA à des patientes et patients atteints de maladies chroniques. Le nouveau modèle tarifaire TARDOC, qui prévoit des positions tarifaires spécifiques pour les CMA, pourrait améliorer la situation. Après avoir été révisé plusieurs fois, le TARDOC avait été présenté dans sa quatrième version au Conseil fédéral pour approbation fin 2021... avant d’être à nouveau refusé début juin 2022. Les médecins de famille et les CMA espèrent que la structure tarifaire pourra tout de même représenter également le travail des CMA, dont la qualité a désormais été prouvée.
Illustration: Marc Siegenthaler, Les Graphistes.
Cet article est paru en parallèle dans «doc.be» 3/22.