In memoriam Georges Spinnler (1931-2020)

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Édition
2020/2930
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2020.19071
Bull Med Suisses. 2020;101(2930):889

Publié le 14.07.2020

Le Professeur Georges Spinnler est décédé le 20 juin 2020 à l’âge de 89 ans. C’est un ingénieur de premier plan qui nous quitte. Diplômé de l’Ecole polytechnique de l’Université de Lausanne en 1955, il participe à la mise en service et à l’exploitation d’un réacteur atomique de recherche à Würenlingen. Au début des années 1960, la direction de l’Exposition ­nationale 1964, donnant suite à l’initiative de Jacques Piccard, mandate Georges Spinnler pour construire le mésoscaphe, le premier sous-marin touristique jamais réalisé au monde. Ce fut une des principales attractions de cette exposition nationale.
En 1965, les Professeurs A. Vannotti et M. Dolivo demandent à Georges Spinnler de construire un nouvel appareil de recherche médicale, un calorimètre direct destiné à mesurer la chaleur émise par un être humain. Cet appareil est construit et installé à l’Hôpital Nestlé dans le service de médecine interne. Un second calorimètre destiné à des mesures chez des nouveau-nés est également construit. Enfin, pour répondre à une demande de l’Université de Genève (Professeur ­Lucien Girardier), Georges Spinnler construit un microcalorimètre destiné à mesurer la chaleur émise par des tissus in vitro (tels des fragments de muscle). Ces réalisations ont valu à Georges Spinnler le Prix Marcel ­Benoist 1973, prix qu’il a partagé avec Lucien Girardier et le soussigné.
Georges Spinnler
Dès 1973, Georges Spinnler est nommé professeur à l’EPFL où il enseigna la conception des machines et les organes des machines. Il publiera trois livres sur ce thème, livres qui sont des références pour tout in­génieur mécanicien. Le soussigné a eu le privilège de collaborer pendant plus de 30 ans avec le Professeur Spinnler dans le domaine de la calorimétrie humaine. Des travaux novateurs concernant les mécanismes de thermorégulation de l’homme et du nouveau-né (en collaboration avec le Professeur Jean-Léopold Micheli) ont été publiés. Pour parachever cette collaboration, Georges Spinnler a construit deux chambres calorimétriques, dispositifs permettant des études sur le bilan énergétique des êtres humains pendant 24 heures. Une chambre, installée à Lausanne à l’Institut de physiologie, a permis de préciser les réels besoins énergétiques de patients obèses. Au lieu d’évaluer leur prise alimentaire, méthode souvent utilisée mais très peu précise, nos études ont permis de mesurer leur dépense d’énergie. Le mythe du patient obèse «petit mangeur» a été définitivement invalidé! La seconde chambre transportée en Gambie (Afrique de l’Ouest) a été très utile pour étudier les mécanismes d’adaptation énergétique de populations soumises à des périodes de restriction alimentaire saisonnière. Les résultats ont montré que cette adaptation était très limitée, contrairement à ce que prétendaient certains chercheurs de la FAO.
Georges Spinnler, ingénieur inventif, a su créer une inter­face technique performante avec des médecins pour faire avancer la recherche médicale. Je tiens à exprimer en leurs noms notre profonde reconnaissance pour tout ce qu’il nous a apporté, et à présenter mes sincères condoléances aux membres de sa famille.
Eric Jéquier,
Professeur honoraire UNIL, Pully
Emjequier[at]bluewin.ch