La formation, gage de qualité

FMH
Édition
2019/44
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2019.18350
Bull Med Suisses. 2019;100(44):1449

Affiliations
Dr, président de l’Institut suisse pour la formation médicale postgraduée et continue (ISFM)

Publié le 29.10.2019

La qualité du système de santé et la qualité des médecins et des hôpitaux sont des thèmes prisés de la presse tant généraliste que spécialisée. L’époque est à l’économie et à la recherche de l’efficience maximum, et le souci de maintenir au moins un niveau de qualité constant est compréhensible. Il se trouve toutefois toujours un politicien ou un expert pour proposer une mesure censée à la fois réduire les coûts et améliorer la qualité. Or si de telles mesures existent, elles sont plutôt rares et tiennent généralement du mirage.
Il est souvent question de qualité des structures, des processus, ou des résultats. Pour définir et quantifier ces dimensions de la qualité, il existe des instruments efficaces, et une pléthore d’organes et entreprises de certification. Mon sentiment est que nous réussissons là où il est possible de définir des paramètres clairs, et où il en va de l’application de méthodes standardisables ou de nouvelles techniques.
Il est par contre beaucoup plus difficile, dans des domaines moins «quantifiables», où les facteurs déterminants sont une prise en charge élargie, la prise de décisions et la pose d’indications, la coordination des mesures et la communication, de dire si l’on avance, si l’on dévie ou si l’on recule. Je suis sceptique, car me semble-t-il, cet aspect de la qualité est étroitement lié au temps à disposition, aux conditions de travail, et à une vision intégrative des problèmes de santé. La médecine dite personnalisée est dans toutes les bouches et c’est une approche très prometteuse, mais la notion recouvre davantage des techniques diagnostiques individualisées, des méthodes thérapeutiques et des médicaments sur mesure qu’une compréhension approfondie de la personnalité d’un patient et de la complexité d’un tableau clinique. Ces aspects sont abordés lors de symposiums, et leur importance régulièrement soulignée à l’aide de mots choisis. Mais le test ultime en la matière est la pratique quotidienne, la condition indispensable est le temps à disposition, et la base, une formation prégraduée et postgraduée solide.
Et nous voici revenus au titre de mon éditorial, La formation, gage de qualité. Je vous l’accorde, la formule est un peu simplificatrice. Mais à n’en pas douter, seule une formation prégraduée et postgraduée solide est à même de garantir un niveau de compétences adéquat au sein de la nouvelle génération de médecins, et ces compétences sont une condition sine qua non pour continuer d’assurer une qualité optimale. Parmi les facteurs pouvant exercer une influence, ce sont l’état des connaissances, les capacités et l’attitude des médecins et des autres catégories d’intervenants qui détermineront ce que sera notre système de santé demain.
Pour soutenir une pratique intelligente de la médecine, diverses initiatives ont vu le jour sous le mot d’ordre «Smarter medicine», dans le cadre desquelles des «top 5» ont été établis pour différents domaines de spécialisation. On y trouve notamment la recommandation de ne poser des cathéters permanents que pour certaines indications spécifiques, et de ne pas les laisser en place pour des raisons de confort uniquement. Les médecins sont également invités à s’abstenir de prescrire des antibiotiques systémiques pour des infections simples des voies respiratoires ou des oreilles, ou à éviter les antirhumatismaux non stéroïdiens pour les cas d’hypertension, d’insuffisance cardiaque ou d’affections rénales. Autant de piqûres de rappel bienvenues, mais dans le fond, une formation prégraduée et postgraduée adéquate, complétée par des cursus de ­formation continue, devrait permettre de se passer de ce type d’initiatives visant à transmettre des connaissances de base. Je ne sais pas trop quoi en ­penser et me dis qu’en plus de bâtir de nouveaux hôpitaux et d’introduire des mesures visant à améliorer l’efficacité, nous devrions veiller à investir suffisamment de ressources – et surtout suffisamment de temps! – dans la formation des médecins. Et c’est bien ainsi que nous réaliserions les plus grands gains en termes de qualité.