Promoteur de la santé

FMH
Édition
2019/34
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2019.18135
Bull Med Suisses. 2019;100(34):1099

Affiliations
Dr méd., membre du Comité central de la FMH, responsable du département Santé publique et professions de la santé

Publié le 20.08.2019

Les facultés de médecine ont adopté en mars 2017 l’introduction de PROFILES (Principal Relevant Objectives and Framework for Integrative Learning and Education in Switzerland). Ce référentiel définit, entre autres, les sept rôles principaux du médecin, dont celui de «promoteur de la santé». Les médecins doivent donc promouvoir la santé, aussi bien au niveau comportemental et individuel qu’au niveau public et structurel. La Conférence suisse de santé publique sur la santé des enfants et des jeunes, qui se tiendra cette année à Winterthour, portera justement sur ce besoin important d’agir sur les structures dans notre pays. La médecine n’a pas le droit de se laisser ­réduire à une simple idéologie politique. La FMH et plusieurs sociétés de discipline médicale approuvent le manifeste pour la santé des enfants et des jeunes. La Suisse a ratifié la convention relative aux droits de l’enfant en 1997. Or, si des organisations telles que MSF agissent dans ce sens, plusieurs entreprises étrangères installées en Suisse ne respectent pas cette convention.
Dans ce contexte, Mark Pieth, professeur de droit pénal à l’Université de Bâle et expert de la corruption internationalement reconnu, s’est exprimé de manière très claire dans la revue Synapse 1/2019 (www.synapse-­online.ch) à propos de la loi sur les produits du tabac. Selon lui, il existe une solution très simple: la transparence. Les hommes et femmes politiques devraient être soumis à des obligations de divulguer leurs revenus et avantages financiers dans le cadre de leur mandat politique. Des milliers d’enfants et de jeunes en Suisse et à l’étranger sont plongés dans la dépendance à la nicotine par des sociétés internationales opérant depuis notre pays. Nos exigences légales contre la publicité et le parrainage en faveur du tabac et contre l’accès des enfants et des jeunes aux produits du tabac ou contenant de la nicotine sont les plus en retard du continent européen. La FMH se félicite donc de la décision de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États (CSSS-E) qui permet de renforcer les dispositions relatives à la publicité pour le tabac. Même si la FMH aurait souhaité que la loi soit encore plus sévère pour que la Suisse reste au contact des 180 États qui ont déjà ratifié la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, elle estime que la décision de la CSSS-E constitue un pas important dans la bonne direction. La régulation de l’accès aux produits du tabac est au cœur de la prévention.
Il ne reste plus qu’à espérer que le débat autour de l’élaboration de la loi sur les produits du tabac s’en tiendra aux questions de santé publique sans dévier sur le cadre réglementaire des interdictions et des droits publicitaires. N’oublions pas que la moitié des enfants et des jeunes qui consomment du tabac (produits de tabac chauffés [HTP] [1] ou cigarettes) risque d’en mourir, mais non sans avoir auparavant permis des milliards de profits aux cigarettiers internationaux et engendré des milliards de dépenses de santé dans de nombreux pays, Suisse comprise. Le corps médical est ensuite tenu responsable de ces coûts d’origine politique.
Le budget global, que le gouvernement allemand ­supprime déjà par étapes, a été reconnu en Allemagne comme un instrument inadapté mais il tente son ­entrée en Suisse sous des dénominations comme «plafonnement des coûts» ou «tarifs dégressifs». Pourtant, comme on a pu le voir chez nos voisins, il ouvre une voie royale vers une médecine à deux vitesses, il provoque une hausse massive des tâches administratives et, de ce fait, il doit être rejeté également du point de vue de la santé publique.
Grâce à PROFILES, nous devrons former davantage de confrères et de consœurs qui s’engagent en tant que «promoteurs de la santé». Car, en plus de la transparence, la politique de la santé en Suisse a aussi besoin d’expertise médicale, en particulier pour lutter contre les «Fake News». Pour cela, soutenons nos collègues qui se présentent aux élections fédérales de l’automne prochain.
1 Uchiyama S et al.: Simple Determination of Gaseous and Particulate Compounds Generated from Heated Tobacco Products, Chem. Res. Toxicol. 2018;31:585−593.