Commission nationale d'éthique pour la médecine humaine CNE

Briefe / Mitteilungen
Édition
2019/11
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2019.17681
Bull Med Suisses. 2019;100(11):386-387

Publié le 13.03.2019

Commission nationale d’éthique pour la médecine humaine CNE

La pratique de l’interruption de grossesse à un stade avancé: la CNE recommande l’élaboration de mesures pour assurer une qualité de soins élevée et uniforme
Les interruptions de grossesse à un stade avancé posent des défis majeurs. Elles sont une source d’incertitudes et une épreuve pour toutes les personnes concernées. En outre, elles soulèvent des questions médicales, juridiques et éthiques qui, jusqu’à présent, n’ont guère été abordées en Suisse. La Commission nationale d’éthique dans le domaine la médecine humaine (CNE) s’exprime sur ces points dans sa dernière prise de position.
Plus de 10 000 interruptions de grossesse sont pratiquées chaque année en Suisse; près de 500 sont réalisées après la 12e semaine, et environ 150 à un stade avancé de la grossesse, soit à partir de la 17e semaine. Parmi ces interventions, environ 40 sont effectuées à partir de la 23e semaine. Ces dernières ne se justifient que si la femme enceinte se trouve dans un état de détresse profonde dûment attesté par un médecin.
En Suisse, les cliniques montrent une variété de pratiques dans la manière de déterminer jusqu’à quel moment et dans quelles circonstances procéder à des interruptions à un stade avancé de la grossesse. L’accès à ces interventions peut être plus difficile dans certaines régions que dans d’autres; ainsi, certaines cliniques en pratiquent un nombre supérieur à la moyenne.
La situation personnelle motivant des interruptions à un stade avancé de la grossesse, le choix qu’elles impliquent et les conséquences qu’elles entraînent peuvent durablement déstabiliser les femmes concernées et leur famille. Dans la pratique actuelle, ces femmes sont en partie prises en charge de manière professionnelle; toutefois, il arrive que les offres de suivi soient insuffisamment coordonnées ou qu’elles ne soient pas disponibles durant toutes les phases pré- et postnatales.
En règle générale, dans notre pays, les interruptions de grossesse à un stade avancé sont provoquées par voie médicamenteuse. Aux alentours de la 17e semaine, les enfants nés de cette manière peuvent commencer à manifester des signes de vie, et à partir de la 22e semaine environ, il est possible qu’ils survivent moyennant une assistance médicale intensive. Lorsqu’un enfant naît vivant après une interruption, comme c’est le cas environ 25 fois par an dans les services de néonatalogie suisses, s’appliquent pour son traitement les mêmes critères que pour les autres enfants extrêmes prématurés. L’accent est mis sur une bonne prise en charge palliative. De plus, les interruptions de grossesse à un stade avancé soulèvent également des questions concernant la méthode appropriée à employer.
Dans sa prise de position, la CNE analyse la pratique des interruptions à un stade avancé de la grossesse et aborde les interrogations complexes d’ordre médical, juridique et éthique que celle-ci suscite. Sur cette base, la commission formule des recommandations sur la sécurité des soins et sur des normes de qualité, sur l’accompagnement et le suivi des femmes enceintes, sur les méthodes utilisées pour interrompre la grossesse et sur la manière de prendre en charge les bébés nés vivants à la suite d’une interruption. Pour assurer une qualité de soins élevée et uniforme au niveau national, la commission recommande d’élaborer des mesures concernant l’échange d’informations et d’expériences ainsi que l’établissement de procédures standard. En outre, elle recommande de donner aux femmes concernées des informations exhaustives sur les différentes méthodes d’interruptions de grossesse et sur les alternatives à une telle intervention, et d’accompagner ces personnes tout au long du processus (autrement dit avant, pendant et après l’interruption). De plus, la commission souligne que les enfants nés vivants après une interruption de grossesse doivent recevoir tous les soins médico-infirmiers dont ils ont besoin et bénéficier de conditions de vie dignes. Enfin, il convient de s’assurer que les femmes ou les couples soient avertis de la possibilité que leur enfant puisse naître vivant et, le cas échéant, de discuter avec eux sur la manière de procéder dans ce cas.
La prise de position est disponible à l’adresse www.nek-cne.ch → Publications.