L'art médical s'apprend sur le terrain

Briefe / Mitteilungen
Édition
2018/16
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2018.06668
Bull Med Suisses. 2018;99(16):510

Publié le 18.04.2018

L’art médical s’apprend sur le terrain

Génial! Le professeur Hans Stalder a osé dire, preuves à l’appui, ce que beaucoup de pra­ticiens pensent depuis longtemps. En subtil clinicien et en excellent enseignant (un professeur devrait d’abord être un enseignant de terrain avant d’être un chercheur et un publicateur!), il a mis le doigt sur le fond du problème. La médecine est un art et il s’apprend au contact des patients. Tout le monde peut lire les livres, mais la médecine s’apprend sur le terrain. C’est au contact des malades que l’on acquiert les gestes, que l’on apprend à repé­rer les petits indices (dans l’anamnèse, pendant l’examen clinique) qui, mis bout à bout, donnent le diagnostic. Et quelle satis­faction d‘avoir reconnu une pathologie rare ou fréquente, mais sur la base de la clinique seule. Ceci est naturellement valable pour la médecine générale, comme dans les spé­cialités.
Les technocrates ont réussi à imposer des normes, des protocoles, des modules pour ­formater toute l’activité et la pensée, comme si notre art pouvait être réduit à des orga­nigrammes rigides, avec, pour conséquence, une diminution du temps consacré aux ­patients. Cette emprise, par ailleurs consommatrice de temps, d’énergie et d’argent, finit par nuire gravement au développement de la pensée médicale qui concerne des personnes uniques dans leur histoire et dans leur maladie.
Un médecin bien formé à la clinique est un médecin efficace et bon marché. Si l’on veut lutter efficacement contre la hausse des coûts, il faut s’engager dans la formation des jeunes, c’est le meilleur investissement qu’une ­société puisse faire, bien avant les infras­truc­tures coûteuses et si vite obsolètes.
Les programmes de formation sont importants, mais il faut ensuite se donner les moyens de les appliquer. Il ne faut pas perdre de vue que la plupart des médecins formés vont s’installer et vont devoir être, à journée faite, au contact des patients. Ils vont faire à 100% ce qu’ils ont fait à moins de 25% durant leur formation. Oui, tout le système doit être repensé, avec des coaching organisés par les plus expérimentés, dans des espaces de temps qui doivent être prioritaires sur les autres et incompressibles.
Une fois de plus un grand merci au Professeur Stalder d’avoir montré les défauts du système d’enseignement actuel et d’avoir rappelé que l’art médical s’apprend sur le terrain.