Des règles de « safer sex » actualisées, un test « safer sex check »

FMH
Édition
2017/45
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2017.06152
Bull Med Suisses. 2017;98(45):1490–1492

Affiliations
a Dr. méd. MPH; b Dr. méd., MSc; c Dr. méd., PD; d Prof. Dr. méd.

Publié le 08.11.2017

De nombreuses consultations touchant à la sexualité permettent de rappeler les règles du «safer sex». Trente ans après le début des campagnes de prévention du VIH, il était temps pour l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) de réexaminer et d’actualiser ses principaux messages en la matière. Concrètement, le préservatif reste la règle fondamentale. Les autres règles ont été précisées et figurent désormais dans un «safer sex check». Après quelques questions, ce test aboutit à des recommandations personnalisées. Il signale, par exemple, que l’on s’expose à une infection sexuellement transmissible (IST) en cas de rapport oral, même sans que du sperme ou du sang ne pénètrent dans la bouche. Une autre règle reste d’actualité en cas de diag­nostic d’IST, les partenaires doivent être dûment informés et se soumettre à un traitement.
Depuis la prise en compte, dans le programme national VIH 2011, d’autres IST (syphilis, gonorrhée et chlamydiose, hépatite virale), le «safer sex» vise la prévention du VIH, mais également celle d’autres infections sexuellement transmissibles. C’est pourquoi les messages de réduction des risques dans les relations sexuelles sont devenus plus complexes ces dernières années. Par ailleurs, recherches récentes ont montré que dans certaines conditions, il existe des possibilités de se protéger de l’acquisition du VIH (par exemple une chimioprophylaxie orale, connue sous le nom de PrEP) ou d’éviter une telle infection après une situation à risque (prophylaxie post-exposition au VIH).
Près de dix ans après la déclaration suisse («Swiss Statement»1), nous pouvons maintenant confirmer qu’une personne sous traitement antirétroviral, et dont la charge virale est indétectable, ne transmet pas le virus en cas de rapport sexuel.
Conjointement avec des représentants de l’Aide suisse contre le sida (ASS), de SANTÉ SEXUELLE Suisse (SSS) et de la Commission fédérale pour la santé sexuelle (CFSS), l’OFSP est parvenu à la conclusion qu’outre le message absolument fondamental – soit l’usage d’un préservatif – ,il est judicieux d’opter pour une approche plus personnalisée.

Règles du «safer sex»: changements

Au nombre de trois, les règles du «safer sex» étaient les suivantes:
1. Pas de pénétration sans préservatif (masculin ou féminin).
2. Pas de sperme, pas de sang menstruel dans la bouche.
3. Consulter immédiatement un médecin en cas de symptômes grippaux après des rapports non protégés ou de démangeaisons, de sensations de brûlure, d’écoulements ou de troubles au niveau des parties génitales.
Dorénavant, seules deux règles de «safer sex» seront communiquées:
1. Pénétration vaginale ou anale avec préservatif.
2. Et parce que chacun(e) l’aime à sa façon: faites sans tarder votre «safer sex check» personnel sur lovelife.ch

«Safer sex check» individuel à faire en ligne

L’OFSP a donc conçu en collaboration avec les institutions précédemment mentionnées et avec le concours de professionnels et de représentants des groupes cibles un test appelé «safer sex check», anonyme, à effectuer en ligne en se connectant au site www.lovelife.ch. Après avoir répondu à quelques questions sur sa sexualité, la personne qui effectue le test recevra des conseils personnalisés en matière de «safer sex», parmi lesquels l’ensemble des recommandations essentielles pour se prémunir du VIH et d’autres IST: protection par un préservatif, vaccinations, informations sur les pratiques sexuelles à risque, consultation avec un spécialiste à propos du VIH et des autres IST, tests biologiques à effectuer. Il est également précisé qu’un traitement antirétroviral efficace prévient la transmission du VIH.
Les recommandations personnelles issues du «safer sex check» peuvent être sauvegardées ou imprimées et/ou conservées en vue d’un entretien de conseil avec un professionnel de la santé. Elles représentent un bilan ponctuel. Si la situation personnelle devait changer, il conviendrait bien entendu de refaire le test en ligne.

Le préservatif demeure essentiel

Les préservatifs constituent une protection fiable face au VIH. Ils réduisent aussi le risque de transmission d’autres IST.

Rapport oral: transmission d’autres IST que le VIH

Le message «Pas de sperme, pas de sang dans la bouche» utilisé jusqu’à présent donnait un sentiment de sécurité trompeur par rapport aux autres IST. En ­effet, en cas de sexe oral, celles-ci sont susceptibles de se propager même en l’absence de sperme ou de sang dans la bouche. Et le risque de transmission du VIH par le sperme ou le sang ayant pénétré dans la bouche est moins élevé qu’on ne le pensait jusqu’ici [2]. Le «safer sex check» rappelle que des IST peuvent être contractées en cas de sexe oral; s’il s’agit généralement d’in­fections guérissables, il est toutefois important de les dépister ­rapidement afin de prévenir toute contamination à d’autres personnes grâce à un traitement approprié.

Une IST doit être envisagée s’il y a les symptômes correspondants ou lors d’un changement de partenaire

En lieu et place de la troisième règle du «safer sex», qui invitait à consulter un médecin en cas de symptômes au niveau des parties génitales, les personnes changeant de partenaires sexuels sont désormais encouragées à consulter un médecin. Il ne suffit pas de pro­céder à un dépistage des IST uniquement chez les personnes présentant des symptômes; en effet, les IST évoluent souvent de façon asymptomatique: à titre d’exemple, les femmes présentent parfois des symptômes au niveau des parties génitales sans IST, et d’autres sont infectées, mais sans aucun symptôme ­apparent. De même, les hommes ayant des relations sexuelles anales passives ne ressentent bien souvent aucun symptôme en cas d’infection [3]. Autrement dit, un changement de partenaire sexuel, tout comme la présence de symptômes, justifient d’être conseillé et dépisté pour la présence éventuelle d’IST.

Importance d’identifier toute primo-­infection VIH

Après une situation à risque, la fièvre et les autres symptômes de type grippal peuvent indiquer une infection par le VIH au stade initial (primo-infection) [4]. Il est capital de détecter une infection au VIH suffisamment tôt: en effet, durant les jours et les semaines suivant l’infection (phase de primo-infection), la charge virale augmente rapidement dans le sang et la personne concernée reste très contagieuse.

Absence de transmission du VIH en cas de traitement antirétroviral efficace

Il est important d’entamer rapidement un traitement antirétroviral non seulement pour préserver la santé de l’individu concerné, mais également avec un objectif de santé publique. En suivant avec succès une thé­rapie VIH, la personne infectée ne contaminera plus d’autres individus lors de rapports sexuels.

La prophylaxie pré-expositionnelle (PReP) et post-expositionnelle (PEP)

Dans certaines conditions, il est également possible de se prémunir d’une infection au moyen d’une prophylaxie pré-expositionnelle au VIH. La CFSS a publié en janvier 2016 des directives à ce sujet [5]. Tout comme il est possible, après une situation à risque, de prévenir une infection au moyen d’une prophylaxie post-expositionnelle [6].

Information des partenaires en cas de diagnostic d’IST

En cas de dépistage d’une IST, il est important d’aborder avec le patient la question de l’information des partenaires sexuels. Des informations et des outils pratiques sont proposés sous le lien http://www.lovelife.ch/fr/hiv-co/information-des-partenaires/ : la personne infectée pourra aisément prévenir ses partenaires de manière factuelle, soit personnellement, soit grâce à des modèles de lettre, de SMS ou de courriel.

Matériel d’information concernant le test du «safer sex»

La campagne LOVE LIFE met à disposition du matériel promotionnel, à savoir une affichette et un présentoir avec des dépliants au format carte de crédit, pour faire connaître le «safer sex check» aux patients ou clients, par exemple dans les cabinets médicaux, les services spécialisés, les centres de consultation, les pharmacies et les drogueries. Ce matériel peut être commandé gra­tuitement sous le lien: www.publicationsfederales.admin.ch → Campagnes → Prévention HIV/STI – LOVE LIFE
Daniel Koch, Dr méd. MPH
Chef de la division
Département fédéral de l’intérieur DFI
Office fédéral de la santé publique OFSP
Division Maladies transmissibles MT
Schwarzenburgstrasse 157,
CH-3003 Berne

Karoline Aebi-Popp, Dr. méd., MSc
Fachärztin Gynäkologie und Geburtshilfe
Universitätsklinik für ­Infektiologie, Inselspital
CH-3010 Berne
Gruppenpraxis Schönburg
CH-3013 Berne

Dr. méd. Alexandra Calmy, PD
Médecin adjointe agrégée
Unité VIH/SIDA
Service de maladies ­infectieuses
4, rue Gabrielle-Perret-­Gentil
CH-1211 Genève 14

Prof. Dr méd. Jan Fehr
Departementsleiter Public Health
Institut für Epidemiologie Biostatistik und Prävention
Universität Zürich
Hirschengraben 84
CH-8001 Zurich
Klinik für Infektions­krank­heiten und Spitalhygiene
UniversitätsSpital Zürich
CH-8091 Zurich
1 Pietro Vernazza, Bernard Hirschel, Enos Bernasconi, Markus Flepp, CFS. Les personnes séropositives ne souffrant d’aucune autre MST et suivant un traitement antirétroviral efficace ne transmettent pas le VIH par voie sexuelle, https://bullmed.ch/fr/resource/jf/journal/file/view/article/bms.2008.13252/2008-05-089.pdf/
2 – Page-Shafer et al. Risk of HIV infection attributable to oral sex among men who have sex with men and in the population of men who have sex with men. AIDS. 2002;16(17).
– Patel et al. Per-act HIV transmission risk estimates. AIDS. 2014;28(10):1509–19.
– Vittinghoff et al. Per-Contact Risk of Human Immunodeficiency Transmission between Male Sexual Partners. Am J Epidemiol. 1999;150(3):306–11.
– Baggaley et al. 2008: Systematic review of orogenital HIV-1 transmission probabilities. Int J Epidemiol. 2008;37:1255–65.
– Del Romero et al. 2002: Evaluating the risk of HIV transmission through unprotected orogenital sex. AIDS. 2002;16(9):1276–97.
3 CID 41:67–74.
5 CFSS: Recommandations de la Commission fédérale pour la santé sexuelle (CFSS) en matière de prophylaxie préexposition contre le VIH (PrEP) en Suisse: https://www.bag.admin.ch/dam/bag/fr/­dokumente/mt/p-und-p/richtlinien-empfehlungen/prep-empfehlungen-der-eksg-januar-2016.pdf.download.pdf/ofsp-04-16-prophylaxie-vih.pdf