Chirurgie préventive et radiothérapie du cancer du sein

Schwerpunkt
Édition
2023/06
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2023.21437
Bull Med Suisses. 2023;103(06):68-70

Publié le 08.02.2023

Thérapie Comme le veut la tradition, les «Educational Sessions» se sont tenues au début du San Antonio Breast Cancer Symposium (SABCS) 2022, le mardi 6 décembre 2022. Ces séries de conférences de deux heures en règle générale et accompagnées de nombreuses discussions, ont permis de traduire les résultats scientifiques des derniers congrès en recommandations que les participants peuvent et doivent appliquer dans leur quotidien clinique.
Dans la tradition du SABCS, trois sujets ont été abordés au sujet du traitement local et pour lequel les recommandations cliniques ont sensiblement évolué – notamment en raison des exposés tenus au SABCS ces dernières années:

Mastectomie préventive pour le cancer du sein héréditaire

La consultation au sujet de la possibilité d’une mutation génétique (et la possibilité de mesures prophylactiques) est une tâche difficile pour toute l’équipe soignante. Une fois le diagnostic potentiellement mortel posé, l’indication d’une modification héréditaire constitue un énorme fardeau supplémentaire pour les personnes concernées. En Suisse, le sujet a été traité très tôt et de manière exemplaire; en 2017, le Groupe Suisse de Recherche Clinique sur le Cancer (SAKK) avait déjà publié le guide pour l’entretien génétique pour soutenir les centres du sein [1] et peu après, la Ligue suisse contre le cancer avait créé une brochure destinée aux patientes [2].
Le sujet a gagné en acuité pour deux raisons: en plus des gènes à haut risque BRCA1 et BRCA2 bien connus, nous conseillons aujourd’hui de manière ciblée sur les gènes PALB2 et TP53 dans de nombreuses constellations familiales. En outre, on trouve une série de gènes de faible pénétrance dans le cancer du sein et des ovaires; ces gènes peuvent être importants pour le traitement local ultérieur, surtout dans le cadre d’une accumulation de cancers au sein de la famille. Ce qui signifie que la complexité du conseil augmente en raison du nombre de gènes.

Résumé pour vous par:

San Antonio Breast Cancer Symposium
Du 6 au 10.12.2022
San Antonio, Texas
Les patientes présentant des mutations germinales des gènes BRCA1 et BRCA 2 ainsi qu’un risque accru de récidive peuvent bénéficier d’un traitement adjuvant avec la substance active olaparib. Cette indication élargit l’indication actuelle des inhibiteurs de la PARP jusqu’à présent utilisés uniquement pour les tumeurs localement avancées ou métastasées. Le spectre s’élargit alors aux patientes qui doivent bénéficier d’un conseil génétique dans le cadre d’un cancer du sein.
Avant d’accepter et de réaliser un test génétique, il est essentiel de conseiller les patientes de manière ciblée et structurée. Au moment de conseiller les patientes présentant des mutations germinales documentées, il convient d’accorder une attention particulière à deux aspects essentiels. Il existe souvent des malentendus sur l’utilité concrète des opérations préventives du sein, principalement chez les patientes de plus de 60 ans. En cas de risque élevé de métastases à distance (malgré un traitement adéquat du cancer du sein), il faut bien réfléchir à l’utilité des opérations préventives du sein. Par ailleurs, si un suivi ciblé est possible (y compris une IRM du sein), il existe une option de conservation du sein pour un certain nombre de ces patientes. Les bénéfices de la chirurgie préventive basés sur des preuves sont très souvent surestimés; le poids, les résultats et la morbidité des chirurgies préventives sont souvent sous-estimés.
Par ailleurs, l’équipe soignante doit aussi accepter que les décisions des patientes sont souvent fondées sur des motifs purement émotionnels. Soutenez votre patiente – même si, d’un point de vue scientifique fondé sur des preuves, vous ne pouvez pas comprendre cette décision.
Peter Dubsky s'exprime lors du SABCS.

Nouveaux concepts pour la radiothérapie du sein

Ces 20 à 30 dernières années, la radiothérapie adjuvante était administrée traditionnellement pendant cinq semaines (dans le cadre de 25 unités thérapeutiques). En recourant à l’hypofractionnement modéré, la durée du traitement peut être réduite à 15 ou 16 unités. L’hypofractionnement modéré est considéré comme la norme thérapeutique dans la radiothérapie adjuvante du cancer du sein – aucune société scientifique n’insiste plus sur les cinq semaines de radiothérapie (tableau 1).
Depuis la publication de l’étude «Fast Forward » (Brunt et al. Lancet 2020), il est désormais possible, en recourant à l’«ultra»-hypofractionnement de raccourcir les unités jusqu’à cinq jours de traitement pour une grande partie de nos patientes (tableau 1). Les preuves scientifiques disponibles montrent que le risque de récidive locale semble globalement extrêmement faible (moins de 2% au bout de cinq ans), mais également que les thérapies courtes présentent à cet égard – si tant est qu’elles en présentent – de petits avantages. Une augmentation des effets secondaires locaux après «ultra»-hypofractionnement fait l’objet d’un débat scientifique: il existe une petite proportion absolue supplémentaire de patientes (1 à 2% de plus par rapport à l’hypofractionnement modéré) qui présente un nombre accru de modifications fibrotiques marquées du sein (induration, réduction mammaire, télangiectasies, etc.). Un suivi structuré est certainement nécessaire pour consolider les résultats.
Cependant, l’impression générale est que les obstacles à l’utilisation quotidienne de l’hypofractionnement en clinique ne sont pas liés à des réserves scientifiques. Tant que le paiement des centres se fera par unité de fractionnement et non par traitement, les incitations financières pour des thérapies plus courtes ou ultra-courtes ne seront pas mises en place. Avec la publication quotidienne et l’augmentation des primes payées par nos patientes, cela ne doit tout simplement pas rester un obstacle.

Radiothérapie et reconstruction après une mastectomie

La radiothérapie post-mastectomie, c’est-à-dire la radiothérapie après l’ablation du sein, est souvent clairement indiquée, en particulier pour les tumeurs de plus de 5 cm, mais aussi en cas d’atteinte des ganglions lymphatiques axillaires. La radiothérapie d’une reconstruction mammaire prothétique, mais également les modifications d’une reconstruction avec des tissus autologues, ne font pas des radiothérapeutes et des chirurgiens reconstructeurs de bons amis. Une fibrose capsulaire des reconstructions en silicone survient dans 30 à 40% des cas. Si l’emplacement de l’implant (devant ou derrière les muscles pectoraux) ou le moment de la pose d’un implant définitif (avant ou après la radiothérapie) est utile semble finalement très variable d’une personne à l’autre. La seule recommandation claire est que les reconstructions autologues doivent être recommandées chaque fois qu’elles sont anatomiquement et cliniquement possibles. La satisfaction des patientes, notamment après une radiothérapie, est nettement meilleure, surtout à long terme. Un grand espoir réside également dans la publication des données du «Supremo-Trial», prévue en 2023: les indications de la PMRT pourraient être en partie relativisées. De plus, la recherche clinique travaille dans le domaine de la radiothérapie néoadjuvante. L’utilisation de la radiothérapie avant la résection constitue certainement une grande chance pour nos patientes.
Prof. Dr méd. Peter Dubsky
est directeur du centre du sein et des tumeurs de la clinique Hirslanden St. Anna à Lucerne. Le chirurgien travaille depuis plus de 20 ans dans la recherche clinique sur le cancer du sein.
peter.dubsky[at]hirslanden.ch