Dépistage de maladies cardiaques: les généralistes sont des acteurs clés

Briefe an die Redaktion
Édition
2023/04
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2023.21409
Bull Med Suisses. 2023;103(04):19

Publié le 25.01.2023

Dépistage de maladies cardiaques: les généralistes sont des acteurs clés

Dans une interview («La poitrine qui tiraille, est-ce normal?») paru dans le dernier BMS de 2022, le Professeur Wyss, cardiologue, constate que de plus en plus de jeunes gens en bonne santé se font examiner le cœur [1]. À la question si les médecins de premier recours ne devraient plus envoyer autant de cas chez les cardiologues, il répond: «Non, cela est dans l’air du temps et ne correspond ni aux exigences de la population ni à celles des médecins en matière de soins de qualité». Puis il ajoute: «Mais lors d’une première consultation, le généraliste a peu de chances de convaincre la personne que tout va bien avec son cœur, car il ne la connaît pas et ne sait pas ce dont elle a besoin en terme de communication.»
Ces constats sont inquiétants. Les médecins généralistes sont justement les acteurs clés pour accueillir et suivre les personnes présentant des non-cardiac chest pains (NCCP) [2], d’autant plus quand elles sont en bonne santé physique [3]. Une anamnèse approfondie associée à un examen clinique et un entretien sont alors les interventions thérapeutiques primordiales [4]. Vouloir systématiquement exclure des pathologies cardiaques sans créer une alliance thérapeutique a pour effet qu’une partie de ces patients continuera à souffrir et à errer dans l’univers médical malgré des examens diagnostiques rassurants [5].
Les médecins généralistes sont compétents pour diagnostiquer des maladies somatiques chez des patients avec NCCP et identifier ceux dont les symptômes sont l’expression d’une problématique psycho-sociale. Il est crucial que ces derniers puissent intégrer, dès la première consultation, les liens qui existent entre psyché/émotions et corps [2, 3]. Il ne s’agit pas de «convaincre le patient que tout va bien avec son cœur», mais de créer un lien et l’impliquer dans la prise en charge.
La proposition d’adresser systématiquement des personnes en bonne santé en cardiologie constitue, selon nous, une pratique inadéquate. En revanche, une approche collaborative, réservant la consultation cardiologique à des situations spécifiques et suivant un modèle de soins intégrés semble bien plus pertinente, limitant les coûts tout en assurant des soins de qualité [6].
Prof. Friedrich Stiefel, chef de service, Psychiatrie de liaison, CHUV, Lausanne;
Prof. Nicolas Senn, médecin chef, Département de médecine de famille, Unisanté, Lausanne
1 Mell E. La poitrine qui tiraille, est-ce normal? Bull Med Suisses. 2022;103(5152):8-9
2 Herzig L, Mühlemann N, Verdon F, Jaunin-Stalder N. Douleurs thoraciques en médecine ambulatoire. Sans oublier les patients qui n’ont «rien au cœur». RMS n°135 28 nov. 2007.
3 Merki V, Hurni B, Egloff N. Les troubles somatiques fonctionnels au cabinet et à l’hôpital. Forum Med Suisse 2022; 22(0304) : 67-71.
4 Frese T, Mahlmeister J, Heitzer M, et al. Chest pain in general practice: frequency, management, and results of encounter. J Family Med Prim Care 2016; 5: 61-66.
5 Campbell KA, Madva EN, Villegas AC, et al. Non-cardiac Chest Pain: A Review for the Consultation-Liaison Psychiatrist. Psychosomatics 2017; 58(3): 252-265.
6 Vester MPM, de Grooth GJ, Bouten TN, et al. Implementation of an integrated care model between general practitioner and cardiologist. J Integr Care 2019; 27: 305-315.