La qualité des soins dépend d'une relève suffisante et qualifiée

FMH
Édition
2022/12
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2022.20632
Bull Med Suisses. 2022;103(12):379-381

Affiliations
a lic. phil. I, MAS Business Communications, cheffe de la division Communication de la FMH; b Dre sc. EPFZ, division Données, démographie et qualité (DDQ) de la FMH; c lic. rer. oec., cheffe de la division Données, démographie et qualité (DDQ) de la FMH

Publié le 22.03.2022

En 2021, la Suisse comptait 39 222 médecins en exercice. Cela correspond à une augmentation de 1,9% par rapport à l’année précédente. L’augmentation du nombre de médecins en exercice ralentit tandis que la dépendance par rapport aux médecins étrangers continue d’augmenter. Plus d’un tiers des médecins exerçant en Suisse ont suivi leurs études de médecine à l’étranger. Des mesures politiques s’imposent pour maintenir une prise en charge de qualité avec un nombre suffisant de professionnels qualifiés.
La pandémie de coronavirus a mis en évidence le rôle essentiel du système de santé et l’importance de soins de qualité pour l’ensemble de la population. Cette dernière a ainsi accepté d’importantes restrictions et dépenses pour maintenir sous contrôle la situation dans les services de soins intensifs. Des médecins qualifiés ont contribué à assurer la bonne prise en charge des patients y compris en situation de crise.
Nous pouvons tous tomber malades et dépendons donc d’un système de santé qui fonctionne et de professionnels qualifiés qui nous soutiennent. Cette prise de conscience permet de porter le regard au-delà de la question des coûts en accordant une plus grande attention à la qualité des soins médicaux. Il s’agit de garantir ces ressources nécessaires à un bon système de santé et à la sécurité des soins. La statistique médicale de la FMH contribue grandement à l’analyse annuelle de ces ressources.

Nombre de médecins en exercice

En 2021, la statistique médicale annuelle de la FMH a comptabilisé 17 599 médecins femmes et 21 623 médecins hommes en exercice en Suisse, soit un total de 39 222. La part de femmes augmente continuellement et atteint désormais 44,9% (voir tableau 1). Comparativement à l’année précédente, le nombre total de médecins a ­augmenté de 720 personnes, ce qui correspond à une augmentation de 1,9%. Le taux de croissance annuel a tendance à diminuer. Parmi les facteurs déterminants à prendre en compte pour assurer aux patients un accès suffisant à des médecins qualifiés figurent notamment la spécialisation, la répartition régionale, le temps de travail hebdomadaire effectif et la structure d’âge.
Tableau 1: Aperçu du nombre de médecins en exercice par sexe et par secteur (activité principale) en 2021.
 FemmesHommesTotal
Nombre%Nombre%Nombre%
Secteur ambulatoire8 90242,512 02857,520 93053,4
Secteur hospitalier8 47147,99 21252,117 68345,1
Autre secteur22637,138362,96091,5
Total17 59944,921 62355,139 222100,0
L’âge moyen des médecins en Suisse s’élève actuellement à 50,0 ans. Un médecin sur quatre est âgé de 60 ans ou plus. Les médecins femmes ont en moyenne 46,6 ans et sont plus jeunes que leurs collègues masculins (52,8 ans), ce qui s’explique par la part croissante de femmes dans les études de médecine. D’une manière générale, l’âge moyen des médecins en exercice a augmenté ces dernières années. De nombreux médecins partiront à la retraite dans les prochaines années, ce qui se répercutera négativement sur l’accès aux soins médicaux.

Taux d’occupation et répartition ­régionale

Le modèle autrefois prisé du cabinet individuel géré par un seul médecin et qui s’accompagnait d’un temps de travail hebdomadaire très long est progressivement remplacé. 46,8% des médecins du secteur ambulatoire exercent dans des cabinets médicaux individuels. Cette proportion a diminué de 16,5% depuis 2009. La part des femmes dans les cabinets médicaux individuels est de 31,8%, soit inférieure à celle des cabinets à deux médecins ou de groupe (44,6%). En moyenne, les cabinets médicaux de groupe réunissent 4,3 médecins.
Aujourd’hui, la plupart du temps, les deux parents travaillent et se répartissent la garde des enfants. Pour le conjoint qui n’exerce pas une profession médicale, la proximité avec la ville peut être un facteur déterminant pour mener une activité professionnelle. Il est donc d’autant plus important de créer de bonnes conditions-cadres pour maintenir malgré tout un approvisionnement médical de base dans les régions ­rurales, ce qui inclut des modèles de travail modernes. Pour un médecin, un plein temps correspond actuellement à 55 heures hebdomadaires. Un plein temps en moyenne suisse de 41,1 heures hebdomadaires correspond donc à un temps partiel pour les médecins (source: Statistique sur le volume du travail [SVOLTA] 2018, OFS). Chez les médecins, les engagements à «temps partiel» ne sont pas une question liée au genre, mais une question de génération. En Suisse, les médecins travaillent en moyenne 48 heures ou 8,7 demi-­journées par semaine.
Les jeunes médecins, en particulier ceux actifs dans le secteur ambulatoire, effectuent rarement 60 heures hebdomadaires et plus, ce qui était encore assez courant il y a 30 ans. Il est donc d’une importance primordiale de tenir compte de l’évolution des taux d’occupation quand il s’agit de définir des nombres maximaux de médecins dans le secteur ambulatoire, comme cela est prévu par le droit des admissions.

Médecins de premier ­recours en recul

Réunissant plus d’un cinquième des médecins en exercice, la médecine interne générale est la spécialisation la plus répandue (21,5%), suivie de la psychiatrie et psychothérapie (10,0%) et de la pédiatrie en troisième position (5,3%). 5,1% des médecins exercent la gynécologie et obstétrique. On constate que la part de ces disciplines dites de premier recours recule à l’échelle suisse depuis 2013. En particulier dans les régions rurales, les cabinets individuels rencontrent de grandes difficultés pour régler leur succession. Cela pose problème quand il s’agit d’assurer une prise en charge de proximité bien intégrée et efficace.
Un tarif équilibré et calculé selon les principes actuels de l’économie d’entreprise serait donc essentiel pour améliorer les conditions des médecins travaillant dans le secteur ambulatoire. Le TARDOC satisfait à ces critères. Il revalorise la médecine de famille et les prestations intellectuelles par rapport aux prestations plus techniques. Ce renforcement de la médecine de premier recours est important pour garantir une prise en charge de qualité. Le TARMED n’est plus approprié et ne correspond plus aux réalités de la médecine moderne. Les prestations techniques sont surtarifées, alors que les prestations qui mobilisent d’importantes ressources en personnel sont sous-tarifées.

Dépendance envers les médecins étrangers

38,4% des médecins exerçant en Suisse ont suivi leurs études de médecine à l’étranger, ce qui correspond à une augmentation de 1% par rapport à l’année précédente. La tendance des années passées se poursuit donc. En 2014, leur part s’élevait à 31%. Dans le secteur ambulatoire, la part des médecins titulaires d’un diplôme étranger est inférieure (36,4%) à celle du secteur hospitalier (40,7%). La plupart des médecins étrangers sont originaires d’Allemagne (51,8%), d’Italie (9,2%), de France (7,2%) et d’Autriche (6,0%). Pour couvrir durablement le besoin en médecins et réduire la dépendance à l’égard de l’étranger, la Suisse doit de toute urgence former plus de médecins. Cela n’a pas de sens de limiter le nombre de places d’études en Suisse pour ensuite recruter des milliers de médecins à l’étranger. En outre, il est aussi discutable du point de vue éthique que la Suisse laisse les contribuables étrangers assurer le ­financement de la formation de ses médecins.
Outre l’augmentation du nombre de places d’études, il est également essentiel de maintenir les médecins dans la profession. Une condition importante à cela est l’existence de bonnes conditions de travail. Nos voisins ont d’ailleurs pris des mesures pour empêcher l’exode de leurs spécialistes. Pour encourager de bonnes conditions de travail, il convient de s’engager pour que la charge administrative à laquelle les médecins sont confrontés baisse. Il s’agit là d’une revendication que la FMH défend avec énergie. Premièrement, l’augmentation de la charge administrative réduit le temps dis­ponible pour les patients et deuxièmement, elle se répercute négativement sur la satisfaction au travail des médecins. Les médecins veulent consacrer leur temps à leurs patients, c’est pour cela qu’ils ont choisi cette profession.

Du ­stationnaire à l’ambulatoire

53,4% des médecins travaillent principalement dans le secteur ambulatoire, 45,1% dans le secteur hospitalier. 1,5% travaillent dans d’autres secteurs (p. ex. administration, assurances ou associations). Le progrès technique permet de réaliser un nombre croissant d’interventions et de traitements sans que le patient doive passer la nuit à l’hôpital. Le secteur ambulatoire enregistre donc une augmentation alors que le secteur stationnaire stagne. Le secteur ambulatoire des hôpitaux connaît aussi une augmentation et depuis 2013, le secteur des cabinets médicaux augmente plus fortement que le secteur des hôpitaux. Dans ce contexte, il serait donc d’autant plus important d’introduire enfin le ­financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS). Ce projet bénéficie d’ailleurs du soutien d’une écrasante majorité des acteurs de la santé. Sans l’EFAS, le déplacement du secteur stationnaire vers l’ambulatoire se fait entièrement au détriment des payeurs de primes, car 100% des prestations ambulatoires, contre seulement 45% des prestations stationnaires, sont financées par les primes. Avec le ­déplacement vers le secteur ambulatoire, les primes maladie augmentent donc de façon disproportionnée par rapport aux coûts de la santé. Et même en cas de stagnation des coûts de la santé, les primes continueraient d’augmenter en raison du financement inégal.

Hôpital: fonctions et échelons hiérarchiques

Dans les hôpitaux, les médecins-assistants en formation postgraduée sont majoritaires et représentent environ 50,4% de l’effectif. La part de femmes médecins est nettement plus élevée dans le secteur hospitalier (47,9%) que dans le secteur ambulatoire (42,5%), ce qui est lié à la structure d’âge: la part de femmes étant plus élevée chez les jeunes médecins en formation post­graduée. 19,3% des médecins hospitaliers travaillent comme chefs de clinique, 13,3% comme médecins adjoints et 9,1% comme médecins-chefs.
Alors que chez les médecins-assistants, la part des femmes est prépondérante (59,6%), elle diminue à mesure que l’on monte dans la hiérarchie: elle est de 49,8% chez les chefs de clinique, de 29,5% chez les médecins adjoints et de 15,3% chez les médecins-chefs. Avec l’augmentation de la proportion de femmes, le nombre de femmes occupant un poste de direction a augmenté ces dernières années. Pourtant, parmi les médecins adjoints et les médecins-chefs, les femmes restent clairement sous-représentées. Cela découle aussi de la part de femmes réduite dans les tranches d’âges supérieu­res qui sont surreprésentées dans les postes de médecin-cadre et médecin-chef. Pour assurer la relève avec des spécialistes qualifiés, il faut cependant veiller à ce que les jeunes médecins femmes soient à l’avenir mieux représentées dans ces positions. Des modèles de travail flexibles, le travail à temps partiel et des possibilités de garde pour les enfants figurent parmi les facteurs clés pour atteindre cet objectif.
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