Nouveau droit des admissions et clause du besoin

FMH
Édition
2021/5152
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2021.20423
Bull Med Suisses. 2021;102(5152):1713-1717

Affiliations
a lic. en droit, avocate, cheffe de la division Service juridique de la FMH ad interim; b Dre en droit, juriste à la division Service juridique de la FMH

Publié le 21.12.2021

Pendant la session d’été 2020, le Parlement a formulé une nouvelle solution, non ­limitée dans le temps, pour l’admission des médecins autorisés à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins (AOS). La mise en œuvre concrète du nouveau droit constituera un défi à relever pour tous les protagonistes impliqués. Dans le présent article, nous dressons un état des lieux de ces nouvelles dispositions relatives au droit des admissions et à la limitation du nombre de médecins admis à pratiquer.

Ire partie: art. 55a de la loi fédérale (LAMal) Limitation du nombre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires

1. Informations utiles

a. Art. 55a LAMal: limitation du nombre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires

Parmi les dispositions du nouveau droit des admissions, pour l’heure, seul l’art. 55a LAMal est entré en ­vigueur le 1er juillet 2021. Cet article impose aux cantons de limiter, dans une ou plusieurs spécialités ou dans certaines régions, le nombre des médecins qui fournissent des prestations ambulatoires à la charge de l’AOS.
Le Conseil fédéral détermine les critères et les bases méthodologiques permettant de fixer les nombres maximaux. Pour la totalité des médecins qui disposent déjà d’une admission cantonale à pratiquer, rien ne change. Seuls relèvent de cette disposition les médecins qui demandent une nouvelle admission à pratiquer.

b. Autres dispositions

L’ordonnance concernant les nombres maximaux de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires, également entrée en vigueur le 1er juillet 2021, règle les critères et les principes méthodologiques permettant de fixer ces seuils maximaux. Le Département fédéral de l’intérieur (DFI) déterminera, à une date ultérieure et dans une ordonnance distincte, les degrés d’approvisionnement par région et domaine de spécialisation médicale.

c. Prescriptions édictées par le Conseil fédéral

Le Conseil fédéral définit les critères et principes ­méthodologiques pour fixer les nombres maximaux. Ce faisant, il tient compte en particulier des flux de patients entre cantons, des régions d’approvisionnement en soins et de l’évolution générale du taux d’activité des médecins.

d. La mise en œuvre est du ressort des cantons

Selon le nouveau droit, ce sont les cantons qui fixent les nombres maximaux de médecins pour l’ensemble du secteur ambulatoire. Ils limitent, dans un ou plusieurs domaines de spécialité ou dans ­certaines régions, le nombre des médecins qui ­fournissent des prestations ambulatoires à la charge de l’AOS.
Pour fixer ces nombres maximaux de médecins qui, selon l’art. 55a, al. 1, LAMal, sont admis à pratiquer à la charge de l’AOS dans un domaine de spécialité déterminé et dans une région déterminée, les cantons se fondent sur l’offre effective des médecins qui exercent leurs activités dans le canton concerné. En outre, ils font appel à des valeurs de référence relatives au taux d’approvisionnement en soins par domaine de spé­cialisation médicale et par région, définies selon une méthodologie uniforme à l’échelle de toute la Suisse. Ces valeurs de référence sont déduites d’un modèle ­national de calcul de régression de l’offre d’approvisionnement en soins établi par le DFI.
Lorsqu’un canton enclenche la clause du besoin, il prévoit que les médecins peuvent obtenir une admission à exercer tant que le nombre maximal déterminé n’est pas atteint, et que le nombre de médecins des catégories de médecins décrites ci-après est limité au nombre maximal déterminé:
• les médecins qui exercent leurs activités dans le ­domaine ambulatoire en cabinet médical ou dans un hôpital;
• les médecins qui exercent leurs activités dans une institution de soins ambulatoires dispensés par des médecins au sens de l’art. 35, al. 2, let. n, LAMal.

e. Dispositions transitoires relatives à l’art. 55a LAMal

A partir de l’entrée en vigueur de l’art. 55a LAMal, à ­savoir à partir du 1er juillet 2021, les cantons disposent d’une période de deux ans, soit jusqu’au 30 juin 2023, pour adapter leurs réglementations cantonales respectives au nouveau droit des admissions. Pour ce qui concerne la limitation des admissions, le droit antérieur demeure applicable jusqu’à ce que la réglementation cantonale soit adaptée dans le canton concerné.
Le nouveau droit d’admission des médecins exerçant en ambulatoire constituera un défi pour tous les acteurs concernés.

FAQ

Quelles sont les conséquences de l’introduction de la clause du besoin?
En cas de limitation du nombre des admissions, les ­médecins qui ont été admis à pratiquer avant l’entrée en vigueur des nombres maximaux et qui fournissaient des prestations dans le domaine ambulatoire pourront continuer à exercer leurs activités. De même, les médecins qui exerçaient leurs activités dans le domaine ambulatoire dans un hôpital ou dans une institution de soins ambulatoires au sens de l’art. 35, al. 2, let. n, LAMal avant l’entrée en vigueur des nombres maximaux pourront continuer d’exercer leurs activités dans le domaine ambulatoire du même hôpital ou de la même institution de soins ambulatoires que jusqu’à présent.
De quels moyens d’intervention dispose le canton en cas d’augmentation des coûts dans un domaine de spécialisation déterminé?
Lorsque dans un canton, les coûts annuels par assuré dans un domaine de spécialité augmentent davantage que les coûts annuels des autres domaines de spécialité dans ce canton ou que la moyenne suisse des coûts annuels dans le domaine de spécialité en question, le canton peut prévoir qu’aucune nouvelle admission à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins n’est délivrée dans ce domaine de spécialité.

II. Nouveaux critères d’admission à ­pratiquer – entrée en vigueur à partir du 1er janvier 2022

1. Informations utiles

La procédure d’admission formelle introduite au 1er janvier 2022 comporte de nouveaux critères pour les fournisseurs de prestations qui veulent exercer à la charge de l’assurance obligatoire des soins et ces critères sont réglementés tant au niveau de la Loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) qu’au niveau de l’Ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal). La mise en œuvre relève de la compétence des cantons, c’est-à-dire que les cantons contrôlent les conditions requises pour l’octroi de l’admission, et délivrent les autorisations d’admission à pratiquer. Cela signifie qu’un médecin qui dépose une demande d’admission auprès d’un canton doit satisfaire à ces nouveaux critères. En fonction du type de fournisseurs de prestations, les conditions d’admission portent sur la formation de base, la formation postgraduée et les exigences nécessaires pour ­assurer la qualité des prestations.

a. Quelles conditions doivent remplir les ­médecins qui souhaitent être admis à ­pratiquer à partir du 1er janvier 2022?

Les médecins qui souhaitent être admis à pratiquer à la charge de l’AOS à partir du 1er janvier 2022 sont tenus de remplir les conditions suivantes:
1. Ils sont titulaires d’une autorisation cantonale d’exercer leur activité professionnelle.
2. Ils détiennent un titre fédéral de formation postgraduée dans le domaine de spécialisation pour lequel l’admission est demandée, ou un titre reconnu par la Commission fédérale des professions médicales (MEBEKO) en cas de titre étranger dans le domaine de spécialisation pour lequel l’admission est demandée.
3. lls doivent avoir exercé la spécialité pour laquelle l’admission est demandée pendant au moins trois ans dans un établissement suisse de formation postgraduée reconnu.
4. Ils disposent des compétences linguistiques nécessaires dans la région dans laquelle ils exercent, sanctionnées par un test de langue qu’ils ont passé en Suisse. C’est-à-dire qu’ils sont en mesure:
a. de comprendre le contenu principal de textes complexes portant sur des sujets concrets ou abstraits et d’en saisir le sens implicite;
b. de s’exprimer spontanément et couramment sans devoir chercher leurs mots;
c. d’utiliser la langue avec efficacité et flexibilité, et de s’exprimer de manière claire et structurée sur des sujets complexes.
Selon le rapport explicatif de l’ordonnance sur ­l’assurance-maladie (OAMal), ces exigences correspondent au niveau C1 du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL).
Les médecins titulaires d’un des diplômes suivants sont exemptés de cette obligation:
a. maturité gymnasiale suisse dont l’une des ­disciplines fondamentales correspond à la langue ­officielle de la région dans laquelle ils exercent;
b. diplôme fédéral de médecine obtenu dans la langue officielle de la région dans laquelle ils exercent;
c. diplôme étranger reconnu par la MEBEKO obtenu dans la langue officielle de la région dans laquelle ils exercent.
Exemple relatif à la let. a ci-dessus: un médecin qui a réussi sa maturité fédérale au Tessin et qui avait l’allemand en tant que discipline fondamentale n’est pas tenu de présenter un diplôme attestant de ses compétences linguistiques en allemand s’il souhaite, p. ex., être admis à pratiquer dans le canton de Zurich.
5. Ils sont tenus d’apporter la preuve qu’ils satisfont aux exigences en matière de qualité selon l’art. 58 g OAMal. Ces exigences sont les suivantes:
a. disposer du personnel nécessaire qualifié;
b. disposer d’un système de gestion de la qualité approprié;
c. disposer d’un système interne de rapports et d’apprentissage approprié et avoir adhéré à un réseau de déclaration des événements indésirables uniforme à l’ensemble de la Suisse, pour autant qu’un tel réseau existe;
d. disposer des équipements permettant de participer aux mesures nationales de qualité.
6. Ils sont tenus de s’affilier à une communauté ou à une communauté de référence certifiée pour participer au dossier électronique du patient.

b. Quelles conditions doivent remplir les insti­tutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins qui souhaitent bénéficier d’une admission à partir du 1er janvier 2022?

Les institutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins (au sens de l’art. 35, al. 2, let. n, LAMal) ne seront admises à exercer leurs activités à partir du 1er janvier 2022 qu’à condition que les médecins qui travaillent dans lesdites institutions remplissent les critères suivants:
1. Ils sont titulaires d’une autorisation cantonale d’exercer leur activité professionnelle.
2. Ils détiennent un titre fédéral de formation postgraduée dans le domaine de spécialisation pour lequel l’admission est demandée, ou un titre reconnu par la Commission fédérale des professions médicales (MEBEKO) en cas de titre étranger dans le domaine de spécialisation pour lequel l’admission est demandée.
3. lls doivent avoir exercé la spécialité pour laquelle l’admission est demandée pendant au moins trois ans dans un établissement suisse de formation postgraduée reconnu.
4. Ils disposent des compétences linguistiques nécessaires dans la région dans laquelle ils exercent, sanctionnées par un test de langue qu’ils ont passé en Suisse. C’est-à-dire qu’ils sont en mesure:
a. de comprendre le contenu principal de textes complexes portant sur des sujets concrets ou abstraits et d’en saisir le sens implicite;
b. de s’exprimer spontanément et couramment sans devoir chercher leurs mots;
c. d’utiliser la langue avec efficacité et flexibilité, et de s’exprimer de manière claire et structurée sur des sujets complexes.
Selon le rapport explicatif de l’ordonnance sur ­l’assurance-maladie (OAMal), ces exigences correspondent au niveau C1 du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL).
Les médecins titulaires d’un des diplômes suivants sont exemptés de cette obligation:
a. maturité gymnasiale suisse dont l’une des dis­ciplines fondamentales correspond à la langue officielle de la région dans laquelle ils exercent;
b. diplôme fédéral de médecine obtenu dans la langue officielle de la région dans laquelle ils exercent;
c. diplôme étranger reconnu par la MEBEKO obtenu dans la langue officielle de la région dans laquelle ils exercent.
5. Ils sont tenus d’apporter la preuve qu’ils satisfont aux exigences en matière de qualité selon l’art. 58 g OAMal. Ces exigences sont les suivantes:
a. disposer du personnel nécessaire qualifié;
b. disposer d’un système de gestion de la qualité approprié;
c. disposer d’un système interne de rapports et d’apprentissage approprié et avoir adhéré à un réseau de déclaration des événements indésirables uniforme à l’ensemble de la Suisse, pour autant qu’un tel réseau existe;
d. disposer des équipements permettant de participer aux mesures nationales de qualité.
6. Les institutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins sont tenues désormais de s’affilier à une communauté ou à une communauté de référence certifiée pour participer au dossier électronique du patient.
Les directives concernant l’admission des médecins ont changé.

Informations importantes

• Les médecins et les institutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins qui ont déjà été admis par le canton à exercer à la charge de l’AOS sont également considérés, selon le nouveau droit, comme étant admis à pratiquer leurs activités sur le même territoire cantonal à partir du 1er janvier 2022.
• Les médecins ou les institutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins qui étaient déjà admis à exercer leurs activités avant le 1er janvier 2022, et qui aimeraient demander une admission à exercer dans un autre canton à partir du 1er janvier 2022, sont tenus de satisfaire aux conditions préalables d’admission à exercer selon le nouveau droit applicables pour cet autre canton.
• Une admission n’est valable que pour le domaine de spécialisation pour lequel elle a été demandée. Dès lors, un médecin au bénéfice de plusieurs titres de formation postgraduée est tenu de demander une admission à pratiquer pour chaque domaine de spécialisation dans lequel il a l’intention d’exercer à la charge de l’AOS.
• Si un canton refuse une demande d’admission, le médecin concerné peut attaquer cette décision ­auprès du tribunal cantonal concerné.
• Selon la Loi fédérale sur les professions médicales universitaires (LPMéd), disposer des connaissances linguistiques nécessaires à l’exercice de la profession est une condition préalable à remplir pour se voir octroyer une autorisation d’exercer son activité professionnelle, à savoir pour pouvoir être véritablement autorisé à exercer le métier de médecin sur le territoire de la Suisse. Un médecin qui dispose d’une autorisation cantonale d’exercer une activité professionnelle, mais qui ne dispose pas d’une autorisation de pratiquer à la charge de l’AOS, est certes autorisé à travailler en tant que médecin, mais il n’est autorisé à pratiquer «que» pour des patients privés, des patients qui paient eux-mêmes leurs factures ou des patients qui sont à la charge d’autres assurances sociales que l’assurance-maladie (à savoir: assurance-invalidité, assurance militaire et assurance-accidents).
• Aux fins d’exécution des exigences en matière de qualité requises selon l’art. 58 g OAMal, la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) a décidé d’émettre des recommandations, disponibles sur le site internet de la CDS (https://www.gdk-cds.ch/fileadmin/docs/public/gdk/themen/gesundheitsberufe/medizinalberufe/EM_Qualitaetsanforderungen_Zulassung_zur_OKP_
20211021_f.pdf). La mise en œuvre concrète de ces recommandations incombe aux différents cantons.
• Dès lors que les cantons sont compétents pour la mise en œuvre du droit des admissions, ils mettront à disposition les informations relatives à la pro­cédure concrète. Si vous avez des questions dont l’étendue va au-delà de ce qui précède, nous vous recommandons de vous renseigner directement à ce sujet auprès de la direction de la santé du canton concerné.
• Le nouveau droit des admissions prévoit que les médecins qui souhaitent être admis à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins à partir du 1er janvier 2022 sont tenus de participer au DEP. Pour ces médecins, cette disposition revient à supprimer le caractère facultatif du DEP. En revanche, elle ne s’applique pas pour l’instant aux médecins déjà admis à pra­tiquer.
• Pour participer au dossier électronique du patient (DEP), les médecins sont tenus de s’affilier à une communauté ou à une communauté de référence certifiée selon la Loi fédérale sur le dossier électronique du patient (LDEP). Le Centre de compétences et coordination de la Confédération et des cantons, eHealth Suisse, publie et actualise continuellement la liste de ces communautés (https://www.patientendossier.ch/fr/population/fournisseurs-dep). La Communauté DEP AD Swiss (AD Swiss), mise sur pied par et pour les médecins, exerce ses activités à l’échelle nationale et permet aux médecins de participer au DEP.
La mise en œuvre du nouveau droit des admissions va soulever de nombreuses questions pratiques. Nous vous informerons en continu à ce sujet et mettrons à jour nos FAQ sur le site internet de la FMH.
lex[at]fmh.ch