L'activité médicale la plus difficile et la plus humaine

Briefe / Mitteilungen
Édition
2021/49
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2021.20386
Bull Med Suisses. 2021;102(49):1655

Publié le 07.12.2021

L’activité médicale la plus difficile et la plus humaine

Dans le point 3 de la mise au point commune FMH-ASSM, il est dit que «le fait qu’un suicide médicalement assisté peut, sous certaines conditions être autorisé par la loi et défendable du point de vue éthique ne change rien au fait que le suicide assisté reste une situation d’exception et non pas un acte médical proprement dit». Cette dernière affirmation est surprenante. Comme si l’aide à la fin de vie ne consistait, et encore qu’«exceptionnellement» seulement, de prescrire l’ordonnance létale et d’assister, parmi d’autres bénévoles au bon déroulement de l’acte final. Les signataires de cette révision semblent ignorer tout le travail en amont des médecins appartenant aux associations d’aide à mourir comme Exit, avec parfois les médecins de famille approuvant ces démarches et sensibilisant les personnes à cette possibilité: écouter les person­nes, les accompagner dans leur décision, rassembler tous les éléments médicaux permettant de comprendre la demande, de s’assurer de leur autonomie de décision, de discuter d’alternatives, de rencontrer les proches, tout cela souvent sur une longue durée. C’est sûrement l’activité médicale la plus difficile et la plus humaine. Cela ressort magnifiquement des récits du livre du Dr Christophe Huber, qui a accompagné de nombreuses personnes, d’abord dans le cadre d’Exit Suisse Alémanique, puis dans l’association Dignitas à Zurich dont il a été médecin-conseil depuis une trentaine d’années*.  
Dans la prise de position commune ci-dessus de la FMH-ASSM, il est dit au début: «Le suicide assisté est aujourd’hui une réalité sociétale avec laquelle les médecins doivent composer, en particulier au regard de leur identité professionnelle et des questions médico-éthiques ainsi soulevées.» Cette position semble admettre, ne serait-ce que du bout des lèvres, que les activités d’associations d’aide à mourir (suicide assisté) sont tolérables et éthiques dans certaines circonstances, c’est-à-dire, vraisemblablement, celles ou les soins palliatifs ne peuvent répondre, même si cela n’est pas dit expressément dans le texte. 
Si le dernier paragraphe (point 3) affirmant que «le suicide assisté reste une situation d’exception et non pas un acte médical proprement dit» était supprimé, ce que je suggère, la révision proposée offrirait déjà aux médecins une opportunité d’ouverture, un désir d’information, et une possibilité de réfléchir aux situations difficiles et diverses de l’aide au suicide, en particulier celles allant au-delà des critères stricts d’Exit; ceci sans crainte de conséquences légales. Le droit absolu de demander une aide à mourir pour les personnes âgées («Interruption volontaire de vieillesse») avec l’aide de la société, sous contrôle strict et sans jugement sur son bien-fondé autre que la certitude de l’autonomie de discernement et l’absence de pressions, constitue le pas de plus qu’il faut soutenir.