Exposition spéciale «Santé − 7000 ans d’art de guérir»

Plantes médicinales et matières fécales de l'âge de pierre

Horizonte
Édition
2021/41
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2021.20179
Bull Med Suisses. 2021;102(41):1346-1347

Affiliations
lic. phil. I, archéologue et coordinatrice d’exposition

Publié le 12.10.2021

Observer des matières fécales millénaires et comprendre comment les opérations crâniennes étaient réalisées à l’âge de pierre? A Zurich, l’exposition interactive «Santé − 7000 ans d’art de guérir» du Kulturama Museum des Menschen («Musée de l’Homme») réunit des découvertes issues de l’archéobotanique, de la parasitologie, de l’anthropologie, de la virologie, de la paléogénétique et de l’histoire de la ­médecine. Elle embarque amateurs et experts dans un voyage à travers l’histoire de la médecine depuis l’âge de pierre.
L’exposition couvre deux thèmes majeurs: l’anthropologie et l’archéobotanique. Les ossements découverts et les recherches en anthropologie illustrent les maladies et les blessures dont les gens souffraient jadis. Dans de bonnes conditions, les ossements humains peuvent se conserver dans le sol pendant des milliers d’années. Ils permettent de déterminer l’âge, le sexe et la constitution physique d’une personne décédée. La malnutrition, les maladies, voire les méthodes de traitement ou les blessures telles que les fractures osseuses et les coups d’épée laissent des traces sur les os [1]. Les ­résultats de diverses recherches archéobotaniques attestent de la présence de plantes médicinales trouvées lors de fouilles archéologiques ainsi que de leur ­utilisation du Néolithique à l’époque moderne [2]. Rares sont les conditions idéales pour la conservation des restes de plantes et des parasites. Provenant des peuplements ­lacustres, les trouvailles exposées ont été conservées dans un environnement humide et à l’abri de l’air.
Exposition interactive sur l’histoire de la médecine − de l’âge de pierre à nos jours (© Kulturama, Joanna Lesniewska).

Utilisation précoce des plantes médicinales

Dès le Néolithique et l’âge du bronze, les humains ont une connaissance approfondie de la ­nature et des propriétés curatives des plantes [3]. Les graines présentes dans les couches successives des cités lacustres montrent que les plantes aux propriétés curatives étaient ramassées intentionnellement ou, pour certaines, cultivées dans les champs. Un exemple en est le pavot, riche en opium. Il est très probable qu’un grand nombre de plantes, auxquelles la médecine populaire a attribué par la suite un effet curatif, étaient déjà utilisées comme plantes médicinales [4].
Graines de pavot, peuplement de Zoug-Sumpf ZG, 1050–870 av. J.-C. 
(© Kulturama, Joanna Lesniewska).

Le village lacustre, piège à microbes

La vie dans un village lacustre n’avait rien de romantique. La cohabitation étroite et le travail pénible n’étaient pas sans conséquences: les signes d’usure, les blessures, les caries, les inflammations et les parasites faisaient partie du quotidien. Près de la moitié des enfants mouraient avant l’âge de cinq ans. Ceux qui atteignaient l’âge adulte ne pouvaient espérer vivre que jusqu’à environ 40 ans [5]. Les couches organiques contiennent non seulement les déchets des peuplements, mais aussi du fumier et des excréments humains. Dans des conditions favorables, même la forme des restes fécaux est préservée. De nombreux parasites intestinaux peuvent y être détectés: le ténia, le trichocéphale, la douve du foie, le ténia du poisson, le ver rénal géant et les vers capillaria. Cependant, une découverte fascinante montre que l’on savait lutter contre ces parasites. Dans un reste fécal exposé provenant d’Arbon, on trouve des spores de fougère mâle, une plante utilisée contre les vers jusqu’à la période historique.
Reste d’excrément humain, Arbon-Bleiche TG, 3380 av. J.-C. (© Kulturama, Joanna Lesniewska).

Chirurgie à crâne ouvert

Les trépanations, soit les ouvertures chirurgicales du crâne, montrent les impressionnantes connaissances médicales à l’âge de pierre. Etonnamment, la personne malade survivait souvent à cette méthode qui servait probablement à lutter contre des douleurs importantes et des infections. On ignore toutefois quels maux étaient traités de cette manière: s’agissait-il de maladies physiques et de blessures spécifiques − ou d’une chose «malfaisante» qui devait être sortie de la tête?
Trépanation, Magleby-Hulbjergbanken (DK), découverte d’une tombe, IV e siècle av. J.-C. (© Lennart Larsen, Nationalmuseet Copenhague).

Offres pour les groupes

Kulturama Museum des Menschen propose des visites guidées de l’exposition «Santé − 7000 ans d’art de guérir» adaptées aux besoins des groupes (en allemand, anglais et espagnol). L’exposition dure jusqu’au 30 avril 2022.
Pour les informations concernant les visites guidées et les heures d’ouverture:
Kulturama Museum des Menschen
mail[at]kulturama.ch
+41 44 260 60 44
1 Czarnetzki A, Hrsg. Stumme Zeugen ihrer Leiden. Paläopathologische Befunde. Tübingen: Attempto-Verlag; 1996.
2 Entretien avec Dorothea Hintermann, commissaire d’exposition au Museum für Urgeschichte(n) à Zug. Health Point 2020;(1):28. www.lendenmann.org/arbeitsproben/HealthPoint/HealthPoint_20_1/HP_20_1_d%2027.pdf
3 Karg S, Weber E. Heilsam, kleidsam, wundersam − Pflanzen im Alltag der Steinzeitmenschen. Darmstadt: wbg Theiss; 2019.
4 Seifert M, et al. Die spätbronzezeitlichen Ufersiedlungen von ­Zug-Sumpf: die Dorfgeschichte. O.O.: Kantonales Museum für ­Urgeschichte; 1996.
5 Bleicher N. Steinzeit im Parkhaus. Moderne Archäologie und das unsichtbare Welterbe der Pfahlbauten. o.O.: NZZ Libro; 2018.