Enjeux actuels pour la profession médicale

D'importants défis nous attendent

Zu guter Letzt
Édition
2020/12
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2020.18630
Bull Med Suisses. 2020;101(12):446

Affiliations
Dr méd., directeur médical du service médical de la Ville de Zurich, Comité AMDHS

Publié le 17.03.2020

Chère lectrice, cher lecteur,
Permettez-moi de me présenter: mon nom est Daniel Schröpfer et je fais partie du comité de rédaction du BMS depuis le début de l’année. C’est un honneur et un plaisir que de pouvoir vous saluer en dernière page du journal cette semaine.
Tout d’abord, j’aimerais dire quelques mots sur mon parcours: après une spécialisation en médecine interne, j’ai exercé plusieurs fonctions dirigeantes jusqu’en 2013, où j’ai accepté un poste au sein de l’ex-«Hôpital des sans-abris» de Zurich, devenu entretemps le réseau de centres médico-sociaux ambulatoires de la Ville de Zurich. A côté de mon activité médicale, je m’engage en politique depuis 2005, à l’origine pour l’introduction de la semaine de 50 heures pour les médecins assistants. Dans l’hôpital où j’exerçais à l’époque, personne ne voulait ou n’était en mesure d’élaborer un tableau de service qui corresponde aux nouvelles dispositions légales. En tant que «jeune» membre de la société cantonale de médecine, j’ai eu tout loisir de me familiariser avec la situation des médecins installés, alors que mon poste de président de l’ASMAC me permettait de contribuer activement à façonner la politique de la santé.
Nous sommes tous au fait des défis qui nous attendent, mais j’aimerais mettre en lumière ici ceux qui me paraissent particulièrement importants.
Premièrement, nous supportons une charge administrative toujours plus lourde. Allons-nous donc devenir des «gestionnaires de patients», sans plus aucune prise en charge individuelle? Tant dans le secteur hospitalier qu’ambulatoire, de nouveaux profils professionnels voient le jour, censés nous «décharger» dans le cadre de notre travail au contact du patient. Mais je ne peux guère imaginer qu’un jour, ces experts puissent remplacer l’entretien médical, l’anamnèse et l’examen ­clinique. N’y aurait-il pas plus de sens à conserver les ­métiers existants en continuant à les développer et à former des personnes chargées de la documentation et du décompte des prestations?
Juste après arrive la question de l’attrait de la profession. Une chose est sûre, l’époque du «demi-dieu» en blouse blanche est bel et bien révolue. Mais ce n’est pas tant la diminution du prestige lié à la profession qui en réduit l’attrait que des modèles de travail dépassés et l’impératif d’économicité.
Des semaines de plus de 60 heures pour les cadres en dissuadent plus d’un et sont difficilement conciliables avec une vie de famille. Il existe bien sûr des exemples de mariage réussi entre exercice de la médecine et vie privée, mais ne faudrait-il pas davantage promouvoir ce genre de modèles dans les hôpitaux? Ne serait-il pas temps qu’on arrête de parler de temps partiels pour mettre en place des conditions d’embauche plus en phase avec notre époque? Plus haut on grimpe dans la hiérarchie et plus la vue devrait être belle, pourrait-on penser. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité: les tâches deviennent presque exclusivement administratives et la marge de manœuvre insignifiante (en fonction de l’employeur). Et l’on se demande pourquoi les hôpitaux peinent à recruter...
Il faut que la médecine tienne compte des paramètres économiques, nous répète-t-on. Mais où se situe le point charnière au-delà duquel la volonté d’économiser débouche sur son contraire? Ne l’avons-nous pas franchi depuis longtemps? Un médecin a le droit de mettre fin à une consultation au bout de 20 minutes parce que l’assurance de base n’en prévoit pas une de plus. Des patients sont ainsi reconvoqués à l’hôpital une fois rentrés chez eux pour des examens qui auraient pu avoir lieu pendant leur séjour, et ce dans le seul but de réduire un déficit comptable. Est-ce bien le patient qui a la priorité, ou les coûts?
Bon. Et moi, je viens faire quoi ici? Le BMS était et reste une des principales sources d’informations du médecin suisse. Pour moi, c’est un journal qui permet un débat large et ouvert et fait la part belle aux opinions aussi diverses qu’originales. Cette liberté rédactionnelle témoigne de son exigence de qualité élevée. J’ai donc été très agréablement surpris lorsqu’on m’a proposé de rejoindre son équipe rédactionnelle.
D’importants défis nous attendent. Le format des journaux évolue à toute vitesse; certains ne paraissent plus qu’en ligne et les revenus des annonces sont en chute libre. Une seule chose est sûre, selon moi: il y aura toujours des changements. Dès aujourd’hui, j’aimerais vous inviter, chère lectrice, cher lecteur, à vous exprimer par le biais de ce canal privilégié qu’est le BMS. Le journal vit de votre participation et nous vous solliciterons toujours plus en ce sens. Un grand merci d’avoir pris le temps de me lire et merci à toutes celles et tous ceux qui m’ont témoigné leur soutien jusqu’ici.
daniel.schroepfer[at]zuerich.ch