A la mode japonaise…

Une éthique pour humanistes combattants

Horizonte
Édition
2019/16
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2019.17747
Bull Med Suisses. 2019;100(16):599

Affiliations
Dr méd., membre de la rédaction

Publié le 16.04.2019

Patrice Franceschi
Ethique du samouraï moderne
Petit manuel de combat pour temps de désarroi
Paris: Grasset, 2019, 185 pages.
ISBN: 978-2246817017.
Patrice Franceschi – né en 1954, est un écrivain français à la carrière mouvementée: aviateur, marin, aventurier dans des régions en guerre, défenseur de populations menacées. Il s’est intéressé aux sagesses d’ailleurs et publie les enseignements d’un maitre japonais «oublié» – virtuel – pour un «humanisme combattant». La ligne générale est proche du stoïcisme, marquée par le devoir de vivre pour le bien commun, de toujours travailler, notamment au service des autres, d’être aux aguets, de s’éloigner des faussaires. Tout en «demeurant son propre souverain.»
De quelques vertus: «Il est rare que le courage appelle le courage, mais la ­générosité appelle presque toujours la générosité. Donner peu c’est recevoir peu. Donner beaucoup c’est re­cevoir beaucoup. Toutefois, s’il vous arrive de donner beaucoup et de recevoir peu, n’en soyez pas blessés. L’ingrat est toujours à lui-même sa propre victime.»
«La vérité a un frère qui s’appelle le silence – c’est lui qui l’aide à naître. Et le mensonge a un allié qui s’appelle le bruit – c’est lui qui l’aide à se propager.»
«Ne faites pas comme les grands esprits qui dissertent leur vie entière sur le bien et le mal et que l’on voit rarement accomplir le premier et éviter le second.»
«Qu’est-ce que l’ignorance? Quelque chose de toujours préférable aux faux savoirs.»
Mener son existence: «Jusqu’à votre dernier souffle, ‘pensez pour agir droitement’ (…) «Penser est la première tâche. Mais cela est dérisoire si la pensée ne mène pas à l’action et l’action à la pensée.» «Soyez certains d’une chose: être libre ou se reposer, il faut choisir.» 
«N’écoutez pas les enseignements qui affirment que le corps n’est rien et que l’esprit est tout. N’écoutez pas davantage ceux qui prétendent que l’esprit peut ­attendre.» «Toutefois, allez par étapes sur ce chemin ardu de la formation. Sinon, l’épuisement guettera.»
«Pour triompher des épreuves, soyez comme les cerisiers en fleurs: une hache suffit à les abattre mais rien ne les trouble parce que les mille fleurs sont leur oeuvre.»
«Il faut être comme ces sages qui, pour voir pousser un chêne, s’assoient à son pied et attendent.» «Observez la pluie qui tombe. Elle féconde la terre sans jamais rien demander. Soyez à l’égal de la pluie: généreux.»
«Dans la termitière du monde, innombrables sont les malheureux qui, pour avoir fait de mauvais choix, ­subissent le joug des geôles sans barreaux qu’ils se sont construites eux-mêmes. Néanmoins, aimez-les comme vous-mêmes.»
La vie et la mort: «Vivez au pas de charge – alors, vers la mort vous irez d’un pas tranquille (…) Il faut laisser derrière vous le fruit de votre passage. A tout le moins, transmettre ce que vous avez reçu.»
«Deux peurs sont répandues à part égale parmi les hommes. La crainte de la mort est une angoisse devant l’inconnu et la peur de vivre est une paralysie. Pour conjurer l’une et l’autre, nous disposons d’un seul moyen: faire de chaque seconde une vie entière.» 
«Vous devez vous demander à chacune de vos décisions: déciderais-je la même chose si ma vie n’avait pas de fin? Et le plus souvent agir et penser comme si votre vie n’avait pas de fin.»
«Plus net encore: il ne faut pas s’attarder à vivre. Pourquoi allonger indéfiniment son existence au-delà du jour où on n’est plus que l’ombre de soi-même? N’est-ce pas là la limite? ll faut vivre vite et partir à temps.»
Et encore: «Le sacré ne provient pas des choses elles-mêmes mais de l’amour qu’on leur porte. Si vous aimez les choses au point de décider qu’elles valent de risquer votre vie pour elles, le sacré surgira.»
«Nous autres samouraïs modernes appelons ‘petit chaos’ la disparition progressive des libertés du quotidien. Le petit chaos s’ajoute au ‘grand chaos’ – la guerre de tous contre tous »
«Le bonheur n’est rien d’autre que l’adéquation constante entre ce que l’on pense et ce que l’on fait.»
«Maître, quelle sera notre meilleure arme pour affronter les barbaries? Ce sera la littérature comme arme de combat, et la poésie comme cuirasse de vie.»
jean.martin[at]saez.ch