Radioprotection: Nouvelles exigences pour les médecins *

FMH
Édition
2018/47
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2018.17352
Bull Med Suisses. 2018;99(47):1644-1646

Affiliations
a Prof., préposé de l’ISFM à la radioprotection; b MLaw, directrice adjointe de l’ISFM

Publié le 21.11.2018

Suite à la révision de la législation sur la radioprotection [1], la nouvelle ordonnance sur la radioprotection (ORaP) [2] est entrée en vigueur le 1er janvier 2018, accompagnée de l’ordonnance du DFI sur les formations, les formations continues et les activités autorisées en matière de radioprotection (ordonnance sur la formation en radioprotection) [3]. Elle est basée sur la loi sur la radioprotection de 1991 mais elle contient désormais des exigences nettement plus strictes et plus détaillées. Les principales nouveautés figurent dans les annexes des ­ordonnances et dans les tableaux détaillés qu’elles contiennent.
La révision de ces bases légales a suscité beaucoup de questions parmi les médecins, notamment en raison des révisions successives des ordonnances: depuis janvier 2018, les nouvelles conditions du devoir de formation continue sont inscrites dans la quatrième version de l’ORaP, et dans la troisième version de l’ordonnance sur la formation en radioprotection. Les lignes qui suivent ont pour but de ­clarifier la ­situation. L’accent est mis sur les ­disciplines dans lesquelles le recours aux rayonnements ionisants n’est pas central; les disciplines dans lesquelles ce dernier joue un rôle central (radio-oncologie, radiologie et médecine nucléaire) sont mentionnées brièvement.

Les nouveautés

L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) récapitule sur son site internet ce qui est nouveau dans le domaine de la médecine (cf. révision totale des ordonnances relatives à la radioprotection).

Répartition des doses radiologiques

Par le passé, il était question d’«examens radiologiques à fortes doses»; cette expression n’est plus utilisée à présent. Désormais, les domaines de doses sont répartis en trois catégories selon la dose radiologique effective délivrée au patient (indiquée en mSv):
Domaines de dosesDose effective (mSv)Domaines d’application
Domaines des doses ­élevées (MA 1 à MA 5)>5
Radioscopie, tomodensitométrie, irradiation thérapeutique
Domaine des doses ­modérées (MA 6)1 à 5
Imagerie médicale de la colonne vertébrale, du bassin et de l’abdomen
Domaines des faibles doses (MA 8 à MA 11)<1
Imagerie médicale du thorax, du crâne, des extrémités

Répartition des activités médicales en lien avec des rayonnements ionisants

Désormais, toutes les activités des médecins en lien avec des rayonnements ionisants sont réparties en numéros de professions («MA»), de MA 1 à MA 6 et de MA 8 à MA 11 selon la dose de rayonnement et l’application (cf. tableau, détails dans l’ordonnance sur la formation en radioprotection). Dans les domaines de la radio-­oncologie/radiothérapie (MA 1), de la médecine nucléaire (MA 3) et de la radiologie (MA 4), la radioprotection est intégrée dans la formation postgraduée en vue du titre de spécialiste. Dans tous les autres cas, des attestations de formation complémentaire séparées sont prévues, comme c’est déjà le cas notamment en angiologie, gastroentérologie, cardiologie et pneumologie.

«Qualité d’expert» et «qualifications techniques»: fonction et formation nécessaire

Par le passé, on faisait la différence entre «qualifi­ca­tions techniques» (utilisation d’une installation radiologique) et «qualité d’expert» (exploitation d’une installation radiologique). Ces notions ont souvent provoqué des confusions car elles n’étaient pas explicites. Désormais, la notion de «qualifications techniques» a été abandonnée; seules demeurent la formation initiale en radioprotection et la fonction d’«expert en radioprotection». Toutefois, la différence entre la notion d’«utiliser» et celle d’«exploiter» une installation radiologique reste importante.
La formation initiale en radioprotection donne le droit d’utiliser une installation radiologique. Dans sa fonction d’«expert en radioprotection», le médecin est habilité à exploiter une installation radiologique: il est donc aussi responsable du personnel qui utilise l’installation.

Formation initiale nécessaire

La formation initiale porte sur la radioprotection et l’application pratique des rayonnements ionisants. Le diplôme fédéral de médecin suffit pour réaliser des clichés selon MA 11 (imagerie médicale du thorax, du crâne et des extrémités dans le domaine des doses faibles). Tous les autres utilisateurs de rayons ionisants doivent suivre une formation adéquate selon un programme de formation postgraduée ou complémentaire. La formation prescrite pour l’obtention d’une attestation de formation complémentaire se compose de deux parties: (a) suivre un cours de radioprotection reconnu par l’OFSP, soit la «formation expert en radio­protection (MA 6 et MA 8) pour les médecins dans les domaines des doses modérées et faibles en radiographie conventionnelle» ou la «formation expert en radioprotection (MA 5) pour les médecins dans les domaines des doses élevées, modérées et faibles en radioscopie», et (b) apprendre les applications techniques et pratiques spécifiques dans des établissements de formation postgraduée de la discipline concernée. L’obtention de l’attestation de formation complémentaire est soit obligatoire parce qu’elle fait partie des conditions posées pour l’obtention du titre de spécialiste (p. ex. chirurgie, orthopédie, urologie), ou facultative (p. ex. cardiologie, pneumologie, gastro­entérologie).
Pour exercer la fonction d’expert en radioprotection, il faut avoir suivi une formation en radioprotection. Pour exploiter une installation radiologique selon MA 11 (cf. ci-avant), le cours de radioprotection reconnu par l’OFSP est suffisant. Dans tous les autres cas, il est nécessaire d’acquérir une attestation de formation complémentaire en radioprotection.
Il est prévu d’adapter tous les programmes de formation complémentaire selon un modèle uniforme, tenant compte des nouvelles ordonnances sur la radioprotection. Les programmes révisés devraient entrer en vigueur l’année prochaine. Cette révision concerne aussi des disciplines comme l’anesthésiologie et la médecine intensive, qui ne font pas l’objet d’une formation complémentaire et dont le programme de formation postgraduée ne mentionne pas pour l’instant les examens radiologiques alors que ceux-ci sont indispensables dans l’activité pratique, p. ex. interventions assistées par radioscopie.
Toutes les sociétés de discipline médicale concernées par la révision de l’ordonnance sur la radio­protection (y compris le Collège de médecine de premier recours) recevront prochainement une proposition de l’ISFM pour une attestation révisée ou une nouvelle attestation.

Dispositions transitoires

Les attestations de formation complémentaire déjà acquises conservent leur validité. Tous les spécialistes des disciplines dans lesquelles la radiothérapie est déjà intégrée dans le titre de spécialiste et qui feront l’objet d’une nouvelle attestation de formation complémentaire pourront profiter des dispositions transitoires pour l’obtention de cette dernière et conserver ainsi leurs droits acquis.

Formation continue obligatoire

L’obligation de continuer à se former existe dans chaque profession. A travers l’attestation de formation complémentaire, les activités médicales sont aussi liées à une formation continue périodique obligatoire dans le domaine de la radioprotection et de l’application pratique des rayons ionisants. Cette obligation est dés­ormais formulée de manière explicite dans la nouvelle ordonnance sur la formation en radioprotection. La forma­tion continue doit couvrir les contenus suivants: répétition des acquis, actualisation et nouveaux développements, connaissances acquises dans le cadre de l’exploitation ou de défaillances techniques (art. 3 al. 1).
Les nouvelles bases légales prescrivent une «périodicité» de 5 ans (art. 175, ORaP, de manière plus détaillée dans l’ordonnance sur la formation en radioprotection). Le nombre recommandé de crédits pour la formation continue est de 8 (MA 1 à MA 5) ou 4 (tous les autres) tous les 5 ans (cf. tableau 3, annexe à l’ordonnance sur la formation en radioprotection). Dans la version initiale, il s’agissait d’une recommandation et non d’une obligation; c’est désormais obligatoire depuis la révision du 12 juin 2018. Sur le plan du contenu, aucune disposition contraignante n’est prévue dans l’ordonnance sur la formation en radioprotection, à l’exception de la médecine nucléaire pour laquelle les sessions de formation continue doivent faire l’objet d’une reconnaissance.
Les détenteurs d’une attestation de formation complémentaire documentent leur formation continue en radioprotection sur la plateforme de l’ISFM [4]. Comme le prévoit la loi, cela comprend l’identité du détenteur de l’attestation, la désignation et la date du cours de formation continue (art. 3 al. 4 de l’ordonnance sur la formation en radioprotection). Les autorités de reconnaissance (OFSP, SUVA et IFSN-ENSI [Inspection fédérale de la sécurité nucléaire]) sont habilitées à vérifier les besoins en formation et en formation continue des personnes concernées et à contrôler la qualité desdites formations (art. 180 al. 5, ORaP).
D’après la nouvelle ordonnance sur la formation en ­radioprotection, tous les médecins qui prescrivent des examens radiologiques sont tenus de suivre une formation continue dans le domaine de la radioprotection, même s’ils ne réalisent pas ces examens eux-mêmes. Une disposition qu’il est cependant possible de nuancer.

Questions?

Le premier auteur se tient à votre entière disposition par courrier électronique (hkoelz[at]bluewin.ch).
Prof. Hans Rudolf Koelz
hkoelz[at]bluewin.ch
1 Révision totale des ordonnances relatives à la radioprotection: https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/gesund-leben/umwelt-und-gesundheit/strahlung-radioaktivitaet-schall/total­revision-der-verordnungen-im-strahlenschutz.html ­(dernier accès 10 novembre 2018).
2 Ordonnance sur la radioprotection: https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20163016/index.html (dernier accès 10 novembre 2018).
3 Ordonnance du DFI sur les formations, les formations continues et les activités autorisées en matière de radioprotection (Ordonnance sur la formation en radioprotection): https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20163019/index.html (dernier accès 10 novembre 2018).
4 Plate-forme de formation continue: https://idp.fmh.ch/desiredfunction.aspx?id=1 (dernier accès 10 novembre 2018).